Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome15.djvu/381

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esprit plus constant que celui de France, comme il produit de meilleurs chevaux et de meilleurs chiens de chasse ? Mais, depuis Bayonne jusqu’aux côtes de Picardie et de Flandre, la France a des hommes d’un travail infatigable, et la Normandie seule a subjugué autrefois l’Angleterre.

Les affaires étaient dans cet état déplorable sur terre et sur mer, lorsqu’un homme[1] d’un génie actif et hardi, mais sage, ayant d’aussi grandes vues que le maréchal de Belle-Isle, avec plus d’esprit, sentit que la France seule pouvait à peine suffire à réparer des pertes si énormes. Il a su engager l’Espagne à soutenir la querelle ; il a fait une cause commune de toutes les branches de la maison de Bourbon[2]. Ainsi l’Espagne et l’Autriche ont été jointes avec la France par le même intérêt. Le Portugal était en effet une province de l’Angleterre, dont elle tirait cinquante millions par an ; il a fallu la frapper par cet endroit, et c’est ce qui a déterminé don Carlos, roi d’Espagne par la mort de son frère Ferdinand, à entrer dans le Portugal. Cette manœuvre est peut-être le plus grand trait de politique dont l’histoire moderne fasse mention : elle a encore été inutile. Les Anglais ont résisté à l’Espagne, et ont sauvé le Portugal.

Autrefois l’Espagne seule était redoutée de toute l’Europe, sous Philippe II, et maintenant, réunie avec la France, elle ne peut rien contre les Anglais. Le comte de La Lippe-Schombourg, l’un des seigneurs de Vestphalie, est envoyé par le roi d’Angleterre au secours du Portugal ; il n’avait jamais commandé en chef[3] ; il

  1. Le duc de Choiseul.
  2. Par la conclusion du Pacte de famille, qui est du 15 auguste 1761. (B.)
  3. Dans la première édition, Voltaire disait : « Le comte de La Lippe-Schombourg, l’un des seigneurs de Vestphalie, encore jeune, qui n’avait commandé jusqu’alors aucune troupe, qui même avait servi à peine, envoyé au secours du Portugal par le roi d’Angleterre, à la tête de quelques Hanovriens et de très-peu d’Anglais, repousse toujours les Espagnols au delà de leurs frontières ; et une flotte d’Angleterre leur a fait payer cher en Amérique leur déclaration tardive en faveur de la France. La Havane, etc. »

    Une réclamation fut insérée dans le Journal encyclopédique du 1er avril 1769 (tome III, page 122) où l’on racontait les services militaires du comte régnant de Schombourg La Lippe, et où l’on niait qu’il eût des troupes hanovriennes on Portugal.

    Voltaire fit insérer dans le tome IV du même Journal (15 juin 1769, page 466} la déclaration que voici :

    « L’auteur s’est servi d’un terme très-impropre en disant que le comte régnant de La Lippe-Schombourg n’avait point encore commandé de troupes, lorsqu’il se signala, en 1762, dans la défense du Portugal. Il est vrai que sa campagne du Portugal n’en serait que plus glorieuse ; mais il fallait dire qu’il n’avait point encore été général d’armée. Cette petite méprise est corrigée dans les éditions nouvelles auxquelles on travaille actuellement. À Ferney, le 30 avril 1769. »

    La correction fut faite en effet dans l’édition in-4o, tome XII, datée de 1709. (B.)