Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome16.djvu/12

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
2
CHAPITRE XLII.


parvenir à un jugement déjà tout préparé, et on se fonda sur des raisons dont aucune assurément n’était comparable à la raison d’État et au consentement des deux parties. On fit revivre l’ancienne défense ecclésiastique d’épouser la fille de son parrain. Henri II, père de Marguerite, avait été parrain de Henri IV. La loi était visiblement abusive, mais on se servait de tout.

On allégua encore que le roi et Marguerite étaient parents au troisième degré, et qu’on n’avait point demandé de dispense, parce que le roi, au temps de son mariage, était d’une religion qui regarde le mariage comme un contrat civil, et non comme un sacrement, et qui ne croit point qu’en aucun cas on ait besoin de la permission du pape pour avoir des enfants.

Enfin l’on supposa que Marguerite avait été forcée par sa mère à épouser Henri. C’était à la fois recourir à un mensonge et à des puérilités. Ce n’était pas ainsi qu’en usaient les anciens Romains, nos maîtres et nos législateurs, dans des occasions pareilles. Le dangereux mélange des lois ecclésiastiques avec les lois civiles a corrompu la vraie jurisprudence de presque toutes les nations modernes : il a été longtemps bien difficile de les concilier. Henri IV fut heureux que Marguerite de Valois fût raisonnable, et le pape politique.



CHAPITRE XLII.
JÉSUITES RAPPELÉS.

Le pape, qui avait donné au roi la permission d’épouser une autre femme, et auquel on demandait encore une autre dispense pour le mariage de Madame Catherine, toujours protestante, avec le fils du duc de Lorraine, exigeait toujours que pour prix de ces deux cérémonies on reçût en France le concile de Trente, et qu’on rappelât les jésuites. Pour le concile de Trente, cela était impossible : on se soumettait sans difficulté à tout ce qui regardait le dogme ; mais il y a vingt-quatre articles[1] qui choquent les droits de tous les souverains, et particulièrement les lois de la France.

  1. Voyez tome XIII, page 94, et tome XV, page 568.