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SECONDE PARTIE. — CHAPITRE XIV.


sous peine de mort, à tous les juges de s’en écarter, et de substituer leur opinion particulière à la loi générale. Cette ordonnance terrible fut affichée, et l’est encore dans tous les tribunaux de l’empire.

Il créait tout. Il n’y avait pas jusqu’à la société qui ne fût son ouvrage. Il régla les rangs entre les hommes, suivant leurs emplois, depuis l’amiral et le maréchal jusqu’à l’enseigne, sans aucun égard pour la naissance, ayant toujours dans l’esprit, et voulant apprendre à sa nation, que des services étaient préférables à des aïeux. Les rangs furent aussi fixés pour les femmes, et quiconque, dans une assemblée, prenait une place qui ne lui était pas assignée payait une amende.

Par un règlement plus utile, tout soldat qui devenait officier devenait gentilhomme, et tout boïard flétri par la justice devenait roturier.

Après la rédaction de ces lois et de ces règlements, il arriva que l’augmentation du commerce, l’accroissement des villes et des richesses, la population de l’empire, les nouvelles entreprises, la création de nouveaux emplois, amenèrent nécessairement une multitude d’affaires nouvelles et de cas imprévus, qui tous étaient la suite des succès mêmes de Pierre dans la réforme générale de ses États.

L’impératrice Élisabeth acheva le corps de lois que son père avait commencé, et ces lois se sont ressenties de la douceur de son règne.


CHAPITRE XIV.
DE LA RELIGION.

Dans ce temps-là même, Pierre travaillait plus que jamais à la réforme du clergé. Il avait aboli le patriarcat, et cet acte d’autorité ne lui avait pas gagné le cœur des ecclésiastiques. Il voulait que l’administration impériale fût toute-puissante, et que l’administration ecclésiastique fût respectée et obéissante. Son dessein était d’établir un conseil de religion toujours subsistant, qui dépendit du souverain et qui ne donnât de lois à l’Église que celles qui seraient approuvées par le maître de tout l’État, dont