Les refus de sacrements, les querelles entre la juridiction civile et les prétentions ecclésiastiques, s’étant multipliés dans les diocèses de Paris, d’Amiens, d’Orléans, de Chartres, de Tours ; les jésuites soufflant secrètement cet incendie ; les jansénistes criant avec fureur ; le schisme paraissant près d’éclater, le parlement avait préparé de très-amples remontrances, et il devait envoyer au roi une grande députation. Le roi ne voulut point la recevoir ; il demanda préalablement à voir les articles sur lesquels ces représentations porteraient ; on les lui envoya[1] : le roi répondit qu’ayant examiné les objets de ces remontrances, il ne voulait point les entendre.
Les chambres s’assemblent aussitôt ; elles déclarent qu’elles cessent toute espèce de service, excepté celui de maintenir la tranquillité publique contre les entreprises du clergé[2]. Le roi leur ordonne, par des lettres de jussion, de reprendre leurs fonctions ordinaires, de rendre la justice à ses sujets, et de ne se plus mêler d’affaires qui ne les regardent pas. Le parlement répond au roi qu’il ne peut obtempérer. Ce mot obtempérer fit à la cour un singulier effet. Toutes les femmes demandaient ce que ce mot voulait dire ; et quand elles surent qu’il signifiait obéir, elles firent plus de bruit que les ministres et que les commis des ministres.
Le roi assemble un grand conseil[3]. On expédie des lettres de cachet pour tous les membres du parlement, excepté ceux de la grand’chambre. Les mousquetaires du roi courent dans toute la ville pendant la nuit du 8 au 9 mai, et font partir tous les présidents et les conseillers des requêtes et des enquêtes pour les lieux de leur exil. On envoie avec une escorte l’abbé Chauvelin au Mont-Saint-Michel, et ensuite à la citadelle de Caen ; le président Frémont de Mazy, petit-fils d’un fameux partisan, au château de Ham en Picardie ; le président de Moreau de Nassigny[4], aux îles de Sainte-Marguerite ; et Bèze de Lys, à Pierre-Encise.