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AVERTISSEMENT.


degré, ou qu’il plaise également à tous les hommes. Tout ce qu’on peut affirmer en connaissance de cause, c’est que telle pièce excelle par tel ou tel endroit ; et si l’on s’en rapporte aux effets du théâtre, si souvent et si vivement manifestés depuis plus de cinquante ans, si l’on consulte l’opinion la plus générale dans toutes les classes de spectateurs, je ne crois pas trop hasarder en assurant que Zaïre est la plus touchante de toutes les tragédies qui existent. » Et plus loin, il semble enchérir encore sur la louange : « Je regarde Zaïre, dit-il, comme un drame égal à ce qu’il y a de plus beau pour la conception et l’ensemble, et supérieur à tout pour l’intérêt. »

Zaïre n’a pas gardé tout à fait dans l’opinion publique le haut rang où la plaçait la critique de la fin du siècle dernier. Mais elle n’a pas disparu de la scène. Le mouvement qui y règne, la passion qui l’anime, la font vivre. Nous avons vu une reprise de cette tragédie au mois d’août 1874, et depuis elle a continué d’être affichée par intervalles.

L’interprétation actuelle est bonne, sans atteindre a la perfection. Mlle Sarah Bernhardt remplit le rôle de Zaïre. Il est douteux que ce rôle ait été plus mélodieusement soupiré par Mlle Gaussin. M. Mounet-Sully a fait du personnage d’Orosmane une création assez bizarre, mais non vulgaire. Il l’a rapproché, plus peut-être que l’auteur ne l’aurait voulu, du type shakespearien, Othello, qui l’a évidemment inspiré. Les autres rôles sont convenablement tenus ; et la tragédie de Voltaire est jouée avec une mise en scène, des décors et des costumes ayant une couleur orientale qu’on ne s’imaginait pas de son temps. Le public a fait à ces représentations un favorable accueil.