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DE LA RÉFLEXION.

parce que Josué commanda au soleil de s’arrêter[1] ? Nieront-ils le développement des germes dans la terre, parce qu’il est dit que le grain doit pourrir avant que de lever[2] ? Il faut donc qu’ils reconnaissent, avec tous les gens de bon sens, que ce n’est point des vérités de physique qu’il faut chercher dans la Bible, et que nous devons y apprendre à devenir meilleurs, et non pas à connaître la nature.


CHAPITRE III.
La propriété que la lumière a de se réfléchir n’était pas véritablement connue. Elle n’est point réfléchie par les parties solides des corps, comme on le croyait. — Aucun corps uni. Lumière non réfléchie par les parties solides. Expériences décisives. Comment et en quel sens la lumière rejaillit du vide même. Comment on en fait l’expérience. Conclusion de cette expérience. Plus les pores sont petits, plus la lumière passe. Mauvaises objections contre ces vérités.


Ayant su ce que c’est que la lumière, d’où elle nous vient, comment et en quel temps elle arrive à nous, voyons ses propriétés et ses effets ignorés jusqu’à nos jours. Le premier de ses effets est qu’elle semble rejaillir de la surface solide de tous les objets, pour en apporter dans nos yeux les images.

Tous les hommes, tous les philosophes, et les Descartes et les Malebranche, et ceux qui se sont éloignés le plus des pensées vulgaires, ont également cru qu’en effet ce sont les surfaces solides des corps qui nous renvoient les rayons. Plus une surface est unie et solide, plus elle fait, dit-on, rejaillir de lumière ; plus un corps a de pores larges et droits, plus il transmet de rayons à travers sa substance. Ainsi le miroir poli, dont le fond est couvert d’une surface de vif-argent, nous renvoie tous les rayons ; ainsi ce même miroir sans vif-argent, ayant des pores droits et larges, et en grand nombre, laisse passer une grande partie des rayons. Plus un corps a de pores larges et droits, plus il est diaphane : tel, disait-on, le diamant ; telle est l’eau elle-même ; voilà les idées généralement reçues, et que personne ne révoquait en doute.

Cependant toutes ces idées sont entièrement fausses : tant ce qui est vraisemblable est souvent ce qui est le plus éloigné de la vérité. Les philosophes se sont jetés en cela dans l’erreur, de la même manière que le vulgaire y est tout porté, quand il pense

  1. Josué, chap. x, verset 12.
  2. Saint Paul, I, Cor., xv, 36 ; saint Jean, xii, 24.