Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome25.djvu/322

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Nous avouons encore ici la démence qu’il a de se dire chrétien quand il sape le premier fondement du christianisme ; mais cette folie ne le rend que plus criminel. Être chrétien et vouloir détruire le christianisme n’est pas seulement d’un blasphémateur, mais d’un traître.

Après avoir insulté Jésus-Christ, il n’est pas surprenant qu’il outrage les ministres de son saint Évangile.

Il traite une de leurs professions de foi d’amphigouri, terme bas et de jargon qui signifie déraison. Il compare leur déclaration aux plaidoyers de Rabelais[1] : Ils ne savent, dit-il, ni ce qu’ils croient, ni ce qu’ils veulent, ni ce qu’ils disent.

« On ne sait, dit-il ailleurs[2], ni ce qu’ils croient, ni ce qu’ils ne croient pas, ni ce qu’ils font semblant de croire. »

Le voilà donc qui les accuse de la plus noire hypocrisie sans la moindre preuve, sans le moindre prétexte. C’est ainsi qu’il traite ceux qui lui ont pardonné sa première apostasie, et qui n’ont pas eu la moindre part à la punition de la seconde, quand ses blasphèmes, répandus dans un mauvais roman, ont été livrés au bourreau. Y a-t-il un seul citoyen parmi nous qui, en pesant de sang-froid cette conduite, ne soit indigné contre le calomniateur ?

Est-il permis à un homme né dans notre ville d’offenser à ce point nos pasteurs, dont la plupart sont nos parents et nos amis, et qui sont quelquefois nos consolateurs ? Considérons qui les traite ainsi : est-ce un savant qui dispute contre des savants ? Non, c’est l’auteur d’un opéra et de deux comédies sifflées. Est-ce un homme de bien qui, trompé par un faux zèle, fait des reproches indiscrets à des hommes vertueux ? Nous avouons avec douleur et en rougissant que c’est un homme qui porte encore les marques funestes de ses débauches, et qui, déguisé en saltimbanque, traîne avec lui de village en village, et de montagne en montagne, la malheureuse dont il fit mourir la mère, et dont il a exposé les enfants à la porte d’un hôpital en rejetant les soins qu’une personne charitable voulait avoir d’eux, et en abjurant tous les sentiments de la nature comme il dépouille ceux de l’honneur et de la religion[3].

  1. Première partie, seconde lettre, page 81.
  2. Ibid., page 82.
  3. Je veux faire avec simplicité la déclaration que semble exiger de moi cet article. Jamais aucune maladie de celles dont parle ici l’auteur, ni petite, ni grande, n’a souillé mon corps. Celle dont je suis affligé n’y a pas le moindre rapport ; elle est née avec moi, comme le savent les personnes encore vivantes qui ont