Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome25.djvu/376

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saloniciens[1] qu’ils iront ensemble au-devant de Jésus, au milieu de l’air. Ce grand miracle, disent les incrédules, ne s’accomplit pas plus que celui du transport des montagnes promis à quiconque aura un grain de foi[2].

Mais on répond que l’avènement de Jésus au milieu des nuages est réservé pour la fin du monde, qu’on croyait alors prochaine. Et à l’égard de la promesse de transporter les montagnes, c’est une expression qui marque que nous n’avons presque jamais une foi parfaite, comme la difficulté de faire passer un chameau par le trou d’une aiguille[3] prouve seulement la difficulté qu’un homme riche soit sauvé.

De même, si l’on prenait à la lettre la plupart des expressions hébraïques dont le Nouveau Testament est rempli, on serait exposé à se scandaliser. « Je ne suis point venu apporter la paix, mais le glaive[4] » est un discours qui effraye les faibles. Ils disent que c’est annoncer une mission destructive et sanguinaire ; que ces paroles ont servi d’excuse aux persécuteurs et aux massacres pendant plus de quatorze siècles, et cette idée est un prétexte à beaucoup de personnes pour haïr la religion chrétienne. Mais quand on veut bien considérer que par ces paroles il faut entendre les combats qui s’élèvent dans le cœur, et le glaive dont on coupe les liens qui nous attachent au monde, alors on s’édifie au lieu de se révolter. Ainsi les miracles de Jésus et ses paraboles sont autant de leçons.


des miracles des apôtres.

On demande comment des langues de feu[5] descendirent sur la tête des apôtres et des disciples dans un galetas ? comment chaque apôtre, en ne parlant que sa langue, parlait en même temps celle de plusieurs peuples qui l’entendaient, chacun dans son idiome ? comment chaque auditeur, entendant prêcher dans sa langue, pouvait dire que les apôtres étaient ivres de vin nouveau au mois de mai ? On peut bien, dit-on, prendre pour un homme ivre celui qui parle sans se faire entendre de personne, mais non celui qui se fait entendre de tout le monde.

Ces petites difficultés, tant de fois proposées, ne doivent faire aucune peine : car dès qu’on est convenu que Dieu a fait des

  1. iv, 16.
  2. Matthieu, xvii, 19.
  3. Matthieu, xix, 24.
  4. Matthieu, x, 34.
  5. Actes, ii, 3-13.