Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome25.djvu/381

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Eh bien ! plaignons l’aveuglement de Benoît Spinosa[1], et imitons sa morale ; étant plus éclairés que lui, soyons, s’il se peut, aussi vertueux.

Je ne regarde ce faible discours que comme des questions qu’un écolier fait à son maître.

Je suis, monsieur, avec respect, etc.


DEUXIEME LETTRE[2].

Monsieur,

Attaché comme vous à notre sainte religion, par mon état et par mon cœur, instruit par vos leçons, désirant de vous imiter et incapable de vous atteindre, je vois avec douleur qu’on n’a pas soutenu la vérité de nos miracles avec autant de sagacité et de profondeur que vous. On a déclamé à la manière ordinaire[3] en supposant toujours ce qui est en question, en disant : « Les miracles de Jésus sont vrais, puisqu’ils sont rapportés dans les Évangiles. » Mais on devait commencer par prouver ces Évangiles, ou du moins renvoyer les lecteurs aux Pères de l’Église qui les ont prouvés, et rapporter leurs raisons victorieuses.

Il faudrait être philosophe, théologien, et savant, pour traiter à fond cette question. Vous réunissez ces trois caractères : je m’adresse encore à vous pour savoir comment un philosophe doit admettre les miracles, et comment un théologien savant en prouve l’authenticité.

  1. Voltaire, dans une note de la satire intitulée les Cabales (voyez tome X), dit que le prénom de Spinosa est Baruch et non Benoit. Il répète la même chose ailleurs.
  2. L’édition originale est intitulée Autres Questions d’un proposant à monsieur le professeur de théologie, sur les miracles ; in-8o de 14 pages.
  3. Dans les Lettres de la plaine, ouvrage que M. l’abbé Sigorgne, grand-vicaire de Mâcon, opposa aux Lettres de la montagne, de J.-J. Rousseau, écrites pour répondre aux Lettres de la campagne, de M. Tronchin. M. l’abbé Sigorgne est l’auteur des Institutions newtoniennes, et c’est lui qui, le premier, a osé enseigner, dans l’Université de Paris, les vérités démontrées par Newton. Mais puisque le géomètre Fatio a bien voulu faire des miracles, pourquoi trouverait-on mauvais qu’un autre géomètre ait la bonté d’y croire ? (K.) — J’ai parlé de J.-R. Tronchin dans mon Avertissement placé en tête du Sentiment des citoyens (ci-dessus, page 309). Pierre Sigorgne, né en 1719 à Rambercourt-les-Pots, est mort à Mâcon le 10 novembre 1809. (B.)

    — Le Fatio dont parlent les éditeurs de Kehl est Fatio de Duiller, né en 1664, mort en 1753.