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DU GOUVERNEMENT
ET DE LA DIVINITÉ
D’AUGUSTE[1]
(1766)
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Ceux qui aiment l’histoire sont bien aises de savoir à quel titre un bourgeois de Velletri gouverna un empire qui s’étendait du mont Taurus au mont Atlas, et de l’Euphrate à l’Océan occidental. Ce ne fut point comme dictateur perpétuel, ce titre avait été trop funeste à Jules César. Auguste ne le porta que onze jours. La crainte de périr comme son prédécesseur, et les conseils d’Agrippa, lui firent prendre d’autres mesures. Il accumula insensiblement sur sa tête toutes les dignités de la république. Treize consulats, le tribunat renouvelé en sa faveur de dix ans en dix ans, le nom de prince du sénat, celui d’empereur, qui d’abord ne signifiait que général d’armée, mais auquel il sut donner une dénomination plus étendue, ce sont là les titres qui semblèrent légitimer sa puissance. Le sénat ne perdit rien de ses honneurs ; il conserva même toujours de très-grands droits. Auguste partagea avec lui toutes les provinces de l’empire ; mais il retint pour lui les principales : enfin, maître de l’argent et des troupes, il fut en effet souverain.

Ce qu’il y eut de plus étrange, c’est que Jules César ayant été

  1. Ce morceau parut en 1766, à la suite des notes qui accompagnaient la tragédie intitulée Octave et le jeune Pompée, ou le Triumvirat (voyez tome V du Théâtre). Voltaire, comme Beuchot l’a déjà dit, tome XVII, page 484, le reproduisit, en 1770, dans la seconde partie des Questions sur l’Encyclopédie. Les éditeurs de Kehl en avaient fait l’article Velletri de leur Dictionnaire philosophique. La version de 1770 commençait ainsi : « On a demandé souvent sous quelle dénomination et à quel titre Octave, citoyen de la petite ville de Velletri, surnommé Auguste, fut le maître d’un empire qui s’étendait, etc. »