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SUR LES FRANÇAIS. 499

est très-plat, et dessus quel endroit est détestable. Ces vers sont de l'abbé de Lavau, et Des Barreaux fut toujours très-fâché qu'on les lui attribuât. C'est ce même abbé de Lavau qui fit cette abomi- nable épigramme sur le mausolée élevé dans Sainl-Eustacbe en l'honneur de Lulli :

��Laissez tomber, sans plus attendre, Sur ce buste honteux votre fatal rideau ;

Et ne montrez (|ue le flambeau Qui devrait avoir mis l'original en cendre.

��DE LA ArOTHE LE VAYER

��Le sage La Mothe Le Vayer, conseiller d'État, précepteur de Monsieur frère de Louis XIV, et qui le fut même de Louis XIV près d'une année, n'essuya pas moins de soupçons que le volup- tueux Des Barreaux. Il y avait encore peu de philosophie en France. Le Traité de la vertu des païens et les Dialogues d'Orasius Tubero lui firent des ennemis. Les jansénistes surtout, qui ne re- gardaient, après saint Augustin, les vertus des grands hommes de l'antiquité que comme des pèches splendides '\ se déchaînèrent contre lui. Le comble de l'insolence fanatique est de dire: « Nul n'aura de vertu que nous et nos amis ; Socrate, Confucius, iMarc- Aurèle, Épictète, ont été des scélérats, puisqu'ils n'étaient pas de notre communion. » On est revenu aujourd'hui de cette extra- vagance, mais alors elle dominait. On a rapporté dans un ouvrage curieux qu'un jour un de ces énergumènes, voyant passer La Mothe Le Vayer dans la galerie du Louvre, dit tout haut: ((Voilà un homme sans religion. » Le Vayer, au lieu de le faire punir, se retourna vers cet homme, et lui dit : « iMon ami, j'ai tant de re- ligion que je ne suis pas de ta religion. »

��DE SAINT-EVREMOND.

��On a donné quelques ouvrages contre le christianisme sous le nom de Saint-Évremond, mais aucun n'est de lui. On crut après sa mort faire passer ces dangereux livres à l'abri de sa ré- putation, parce qu'en effet on trouve dans ses véritables ouvrages plusieurs traits qui annoncent un esprit dégagé des préjugés de

I. Voyez aussi son article, tome XIV, pa?e 80.

'2. Saint Augustin; voyez la note, tome XVIJI, page 7î.

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