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L’A, B, C.

B. Et que nous apprcndra-t-elle?

A.

Que plus les lois de convention se rapprochent de la loi natu- relle, et plus la vie est supportaljle^

C. Voyons donc.



SEPTIÈME ENTRETIEN.
QUE L’EUROPE MODERNE VAUT MIEUX QUE L’EUROPE ANCIENNE.


C.

Seriez-vous assez hardi pour me soutenir que vous autres Anglais vous valez mieux que les Athéniens et les Romains ; que vos comhats de coqs ou de gladiateurs, dans une enceinte de planches pourries, l’emportent sur le Golisée? Les savetiers et les bouITons qui jouent leurs rôles dans vos tragédies sont-ils supé- rieurs aux héros de Sophocle? Vos orateurs font-ils oublier Cicéron et Démosthène ? Et enfin Londres est-elle mieux policée que l’ancienne Rome?

A.

Non ; mais Londres vaut dix mille fois mieux qu’elle ne valait alors, et il en est de même du reste de l’Europe.

B.

Ah! exceptez-en, je vous prie, la Grèce, qui obéit au Grand Turc, et la malheureuse partie de l’Italie qui obéit au pape.

A.

Je les excepte aussi; mais songez que Paris, qui n’est que d’un dixième moins grand que Londres, n’était alors qu’une petite cité barbare. Amsterdam n’était qu’un marais, Madrid un désert, et de la rive droite du Rhin jusqu’au golfe de Bothnie tout était sauvage; les habitants decesclimats vivaient, comme lesTartares ont toujours vécu, dans l’ignorance, dans la disette, dans la bar- barie.

1. Voilà une grande vérité, très-peu connue, mais dite si simplement que les lecteurs frivoles ne l’ont pas remarquée; et on continue à répéter que M. de Voltaire était un philosophe superficiel, parce qu’il n’était ni déclamatenr ni énigmatique. (K.)