Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome27.djvu/472

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pour vous annoncer que vos prières sont exaucées, et que vos aumônes sont montées jusqu’à lui. Car il a vu votre honte, et il a entendu le reproche de stérilité que vous avez essuyé injustement. Or, Dieu punit le péché et non la nature : c’est pourquoi lorsqu’il rend quelqu’un stérile, ce n’est que pour faire ensuite éclater ses merveilles, et montrer que l’enfant qui naît est un don de Dieu, et non pas le fruit d’une passion honteuse. Sara, la première mère de votre nation, ne fut-elle pas stérile jusqu’à l’âge de quatre-vingts ans[1] ? Et cependant, au dernier âge de la vieillesse, elle engendra Isaac, auquel la bénédiction de toutes les nations était promise. De même Rachel[2], si agréable au Seigneur et si fort aimée du saint homme Jacob, fut longtemps stérile ; et cependant elle engendra Joseph, qui devint le maître de l’Égypte, et le libérateur de plusieurs nations prêtes à mourir de faim. Lequel de vos chefs a été plus fort que Samson, ou plus saint que Samuel ? Et cependant ils eurent tous les deux des mères stériles[3]. Si donc la raison ne vous persuade point par mes paroles, croyez par l’effet que les conceptions longtemps différées, et les accouchements stériles, n’en sont d’ordinaire que plus merveilleux. Ainsi votre femme Anne vous enfantera une fille que vous nommerez Marie ; elle sera consacrée au Seigneur dès son enfance, comme vous en avez fait vœu, et elle sera remplie du Saint-Esprit, même dès le sein de sa mère[4]. Elle ne mangera ni ne boira rien d’impur, n’aura aucune société avec la populace du dehors ; mais sa conversation sera dans le temple du Seigneur, de peur qu’on ne puisse soupçonner ou dire quelque chose de désavantageux sur son compte. C’est pourquoi en avançant en âge, comme elle-même naîtra d’une mère stérile, de même cette vierge incomparable engendrera le fils du Très-Haut, qui sera appelé Jésus, sera le sauveur de toutes les nations, selon l’étymologie de ce nom[5]. Et voici le signe[6] que vous aurez des choses que je vous annonce. Lorsque vous arriverez à la porte d’or, qui est à Jérusalem, vous y trouverez votre épouse Anne qui viendra au-devant de vous, laquelle aura autant de joie de vous voir qu’elle avait eu d’inquiétude du délai de votre retour. Après ces paroles l’ange s’éloigna de lui.

  1. La Genèse, ch. xvii, v. 17, lui donne alors quatre-vingt-dix ans. (Note de Voltaire.)
  2. Genes., ch. xxx, v. 23. (Id.)
  3. Jud., ch. xiii, v. 3 ; et i, Reg., ch. i, v. 20. (Id.)
  4. Luc, ch. i, v. 15. (Id.)
  5. Matth., ch. i, v. 21. (Id.)
  6. Luc, ch. ii, v. 12. (Id.)