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DISCOURS

en a point d’autre que lui… Entends, Israël, le Seigneur notre Dieu ; il est le seul Dieu… » Enfin Moïse, faisant parler le Dieu des Juifs, lui fait dire : « Voyez qui je suis ; il n’y a point d’autre Dieu que moi. » Voilà des preuves de l’évidence la plus claire que Moïse ne reconnut et n’admit jamais d’autre dieu que le Dieu d’Israël, le Dieu unique. Les Galiléens répondront peut-être qu’ils n’en admettent ni deux, ni trois ; mais je les forcerai de convenir du contraire, par l’autorité de Jean, dont je rapporterai le témoignage[1] : « Au commencement était le verbe, et le verbe était chez Dieu, et Dieu était le verbe. » Remarquez qu’il est dit que celui qui a été engendré de Marie était en Dieu : or, soit que ce soit un autre dieu (car il n’est pas nécessaire que j’examine à présent l’opinion de Photin : je vous laisse, ô Galiléens, à terminer les disputes qui sont entre vous à ce sujet), il s’ensuivra toujours que, puisque ce verbe a été avec Dieu, et qu’il y a été dès le commencement, c’est un second dieu qui lui est égal. Je n’ai pas besoin de citer d’autre témoignage de votre croyance que celui de Jean : comment donc vos sentiments peuvent-ils s’accorder avec ceux de Moïse ? Vous répliquerez qu’ils sont conformes aux écrits d’Ésaïe, qui dit : « Voici une vierge dont la matrice est remplie, et elle aura un fils. » Je veux supposer que cela a été dit par l’inspiration divine, quoiqu’il ne soit rien de moins véritable : cela ne conviendra pas cependant à Marie ; on ne peut regarder comme vierge, et appeler de ce nom celle qui était mariée, et qui, avant d’enfanter, avait couché avec son mari. Passons plus avant, et convenons que les paroles d’Ésaïe regardent Marie. Il s’est bien gardé de dire que cette vierge accoucherait d’un Dieu : mais vous, Galiléens, vous ne cessez de donner à Marie le nom de mère de Dieu. Est-ce qu’Ésaïe a écrit que celui qui naîtrait de cette vierge serait « le fils unique engendré de Dieu, et le premier-né de toutes les créatures » ? Pouvez-vous, ô Galiléens ! montrer, dans aucun prophète, quelque chose qui convienne à ces paroles de Jean[2] : « Toutes choses ont été faites par lui, et sans lui rien n’a été fait » ? Entendez au contraire comme s’expliquent vos prophètes. « Seigneur notre Dieu, dit Ésaïe[3], sois notre protecteur ; excepté toi, nous n’en connaissons point d’autre. » Le même Ésaïe, introduisant le roi Ézéchias priant Dieu, lui fait dire[4] : « Seigneur, Dieu d’Israël, toi

  1. Évangile de Jean, ch. i. (Note de Voltaire.)
  2. Jean, i. (Id.)
  3. Isaïe, xxvi et xxvii. (Id.)
  4. xxxvii, 16.