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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome28.djvu/87

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PROCÈS DE CLAUSTRE


SUPPLÉMENT AUX CAUSES CÉLÈBRES[1].
INGRATITUDE, HYPOCRISIE, RAPACITÉ, ET IMPOSTURES JUGÉES.

Toutes les causes intitulées célèbres ne le sont pas : il y en a même de fort obscures, et qui ont été écrites d’une manière très-conforme au sujet[2] ; mais il n’est guère de procès dont la connaissance ne puisse être utile au public. Car dans le labyrinthe de nos lois, dans l’incertitude de notre jurisprudence, au milieu de tant de coutumes et de maximes qui se combattent, un arrêt solennel sert au moins de présomption en cas pareil, s’il est des cas absolument pareils.

La cause que nous traitons ici est des plus communes et des plus obscures par elle-même. Il s’agit d’un prêtre ingrat ; rien n’est plus commun. Il s’agit dim précepteur nommé Claustre ; quoi de plus obscur ? Mais si ce précepteur Claustre a mis le trouble dans une nombreuse famille ; si son ingratitude, fortifiée par son intérêt, a voulu s’approprier le bien d’autrui ; s’il s’est servi, selon l’usage, du manteau de la religion pour soulever un fils contre son père ; s’il a charitablement séduit son pupille pour lui donner sa nièce en mariage ; si, devenu l’oncle de son élève, il a été assez mondain dans sa dévotion pour tenter de s’emparer, sous le nom de cet élève, du bien d’une famille entière ; s’il a employé les fraudes pieuses et les dévotes calomnies pour faire réussir ses manœuvres, alors la pièce devient intéressante,

  1. Il ne peut y avoir aucun doute sur la date de cet opuscule. Les Mémoires secrets en parlent à la date du 13 juillet 1769. C’est donc à cette année (et non à 1770) qu’il appartient. Mme de Laborde Desmartres, ayant écrit à Voltaire pour s’en plaindre, reçut en réponse une lettre datée du 18 septembre 1760, où Voltaire dit ne pas connaître le Supplément aux causes célèbres ; voyez cette lettre dans la Correspondance. (B.)
  2. Les Causes célèbres et intéressantes, 1734 et années suivantes, vingt volumes in-12, sont de Gayot de Pitaval, dont il a été parlé, tome XIV, page 456.