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DISCOURS


DE ME BELLEGUIER


ANCIEN AVOCAT
SUR, LE TEXTE PROPOSÉ PAR L’UNIVERSITÉ DE LA VILLE DE PARIS, POUR LE SUJET DU PRIX DE L’ANNÉE 1773.



AVERTISSEMENT
DES ÉDITEURS DE L’ÉDITION DE KEHL.

L’Université de Paris est dans l’usage de proposer chaque année un prix pour un discours latin[1]. La langue française, qu’on y appelle poliment lingua vernacula (la langue des laquais[2], ne paraît point à nos maîtres d’éloquence valoir la peine d’être encouragée. Il est évident que nos colonels, nos magistrats, nos évêques, ne parlant jamais que français, on ne peut se dispenser d’employer les trois quarts du temps de leur éducation à leur apprendre à faire des phrases en latin ; sans cette précaution, ils ne parleraient cette langue de leur vie.

Le prix ne peut être disputé que par des maîtres ès arts : il fut fondé dans un temps où les jésuites existaient encore, et on sait quel scandale se serait élevé dans l’Université si, par mégarde, elle avait couronné le latin du collège de Clermont.

Cependant M. Cogé, professeur de rhétorique au collège Mazarin, s’avisa, vers 1768, de faire un livre contre le quinzième chapitre de Bélisaire, où il prouva doctement que, pour éviter d’être brûlé pendant toute l’éternité, il faut croire que Trajan, Marc-Aurèle, et Titus, sont dans l’enfer pour jamais, et de plus contribuer de toutes ses forces à faire brûler de leur

  1. Il s’agissait d’un prix fondé par le libraire Coignard en 1747, et décerné chaque année, le jour même de la distribution des prix du concours général des collèges.
  2. C’est une interprétation des éditeurs de l’édition de Kehl, qui, dans cet avertissement, ont voulu avoir trop d’esprit.