Tu frémis. Tu ressens le courroux qui m’enflamme.
L’horreur de cette injure a passé dans ton âme.
Un dieu sans doute, un dieu, qui préside à l’amour,
Dans le sein du trépas me conserva le jour.
Tu n’as point démenti ce grand dieu qui me guide ;
Tu n’ès point devenue espagnole et perfide.
On dit que ce Gusman respire dans ces lieux,
Je venais t’arracher à ce monstre odieux.
Tu m’aimes : vengeons-nous ; livre-moi ma victime.
Oui, tu dois te venger, tu dois punir le crime,
Frappe.
Que me dis-tu ? Quoi, tes vœux ! Quoi, ta foi !
Frappe, je suis indigne, et du jour, et de toi.
Ah Montèze ! Ah, cruel ! Mon cœur n’a pu te croire.
A-t-il osé t’apprendre une action si noire ?
Sais-tu pour quel époux j’ai pu t’abandonner ?
Non, mais parle : aujourd’hui rien ne peut m’étonner.
Eh bien ! Vois donc l’abîme où le sort nous engage :
Vois le comble du crime, ainsi que de l’outrage.
Alzire !
Ce Gusman…
Grand dieu !
Ton assassin,
Vient en ce même instant de recevoir ma main.
Lui !
Mon père, Alvarès, ont trompé ma jeunesse.
Ils ont à cet hymen entraîné ma faiblesse.
Ta criminelle amante, aux autels des chrétiens,
Vient, presque sous tes yeux, de former ces liens.