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448 COMMENTAIRE

cienne Rome. Romiilus, Numa, Enitus, Cauiilliis, leur appar- tiennent à toutes. L'hidalgo espagnol et le gentleman english apprennent à lire dans la langue de César. On aime à voir le >>• faible ruisseau dont est sorti à la fin ce grand fleuve qui a inondé la terre.

On ne prononce aujourd'hui le nom d'Ostrogoth, deVisigoth, de Hun, de Franc, de Vandale, d'Hérule, de toutes ces hordes qui ont détruit l'empire romain, qu'avec le dégoût et l'horreur qu'inspirent les noms des hètes sauvages puantes. Mais chaque peuple de l'Europe veut couvrir de quelque éclat la turpitude de son origine. L'Espagne vante son saint Ferdinand, l'Angle- terre son saint Edouard, la Fiance son saint Louis. Si à .Madrid on remonte aux rois goths, nous remontons dans Paris aux rois francs. Mais qui étaient ces Francs, que Montesquieu de Bordeaux appelle nos pcres? C'étaient, comme tous les autres barbares du Nord, des bêtes féroces qui cherchaient de la pâture, un gîte, et quelques vêtements contre la neige.

D'où venaient-ils? Clovis n'en savait rien, ni nous non plus. On savait seulement qu'ils demeuraient à l'orient du Rhin et du Mein, et que leurs bœufs, leurs vaches et leurs moutons, ne leur suffisaient pas. N'ayant point de villes, ils allaient, quand ils le pouvaient, piller les villes romaines dans la Gaule germanique et dans la Belgique. Ils s'avançaient quelquefois jusqu'à la Loire, et revenaient partager dans leurs repaires tout ce qu'ils avaient volé. C'est ainsi qu'en usèrent leurs capitaines Clodion, Mérovée, et Childéric, père de Clovis, lequel Childéric mourut et fut enterré dans un grand chemin près de Tournai, selon l'usage de ces peuples et de ces temps.

Tantôt les empereurs achetaient quelques trêves à leurs bri- gandages, tantôt ils les punissaient, selon qu'ils avaient, dans ces cantons éloignés, quelques troupes et quelque argent. Cons- tantin avait pénétré lui-même jusque dans leurs retraites en 313 de notre ère, avait saisi leurs chefs, qui étaient, dit-on, les an- cêtres de Clovis, et les avait condamnés aux bêtes dans le cirque de Trêves, comme des esclaves révoltés et des voleurs publics.

Les Francs, depuis ce jour, eurent de nouvelles rapines à chercher, et la mort ignominieuse de leurs chefs à venger sur les Romains. Ils se joignirent souvent à toutes les hordes alle- mandes qui passaient aisément le Rhin, malgré les colonies ro- maines de Cologne, de Trêves, de Mayence. Ils surprirent Co- logne et la pillèrent. Lorsque Julien était césar dans les Gaules,

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