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248 REMARQUES SUR SERTORIUS.

tique n'excitera jamais les grands mouvements, qui sont Pâme de la tragédie. Il est dit dans le Bolœana que Boileau n'aimait pas cette fameuse conférence de Sertoriuset de Pompée. On pré- tend que Boileau disait que cette scène n'était ni dans la raison, ni dans la nature, et qu'il était ridicule que Pompée vînt rede- mander sa femme à Scrtorius, tandis qu'il en avait une autre de la main de Sylla. J'avoue que l'objet de cette conférence peut être critiqué; mais j'ai bien de la peine à croire que Boileau ne fût pas content des morceaux adroits et sublimes de cette scène; il savait trop bien que le goût consiste à savoir admirer les beautés au milieu des défauts.

SCÈNE IV.

Après une scène de politique, il n'est guère possible que ja- mais une scène de tendresse puisse réussir. Le cœur veut être mené par degrés : il ne peut passer rapidement d'un sujet à un autre, et toutes les fois qu'on promène ainsi le spectateur d'objets en objets, tout intérêt cesse. C'est une des raisons qui empêcbent presque toutes les tragédies de Corneille d'être touchantes : il paraît qu'il a senti ce défaut, puisque Sertorius et Pompée ont parlé d'Aristie à la fin de la scène précédente ; mais ils n'en ont parlé que par occasion.

Vers 3. Suivant qu'on m'aime ou hait, j'aime ou hais à mon tour, etc.

Ce vers et les suivants sont un peu du haut comique, et ôtent à la femme de Pompée toute sa dignité.

Vers 13. Mon feu, qui n'est éteint que parce qu'il doit l'être, Cherche en dépit de moi le vôtre pour renaître, etc.

Ce feu qui cherche le feu de Pompée, ce courroux qui trébuche, en un mot cette scène entre un mari et une femme ne passerait, pas aujourd'hui.

\ ers 17. .M'aimerie/.-vous encor, seigneur? — Si je vous aime !

Ce qui fait en partie que cette scène est froide, c'est précisé- ment cette chaleur que Pompée essaye de mettre dans sa réponse à sa femme. S'il est vrai qu'il l'aime si tendrement, il joue le rôle d'un lâche de l'avoir répudiée par crainte de Sylla ; et Pompée ainsi avili ne peut plus intéresser les spectateurs, comme on vient de le faire voir. Aristie plaît encore moins, en ne paraissant que pour dire à Pompée qu'elle prendra un autre mari s'il ne veut

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