ACTE II, SCÈNE V. 331
nages. Le lecteur, le spectateur éclairé veut savoir précisé ni
de quoi il s'agit. Il est tenté d'interrompre la reine Elisabeth, el de lui dire : De quoi vous plaignez- vous ? Expliquez-vous nette- ment :1e comte d'Essex a-t-il voulu vous poignarder, se faire reconnaître roi d'Angleterre en épousant la sœur de ce Suffolk? Développez-nous donc comment un dessein si atroce et si fou a pu se former; comment votre général de l'artillerie dépossédé par vous, comment un simple gentilhomme s'est mis dans la tête de vous succéder: cela vaut bien la peine d'être expliqué. Ce que vous dites est aussi incroyable que vos lamentations de n'être point aimée à 1 âge de près de soixante et dix ans sont ridicules. J'ajouterais encore : Parlez en plus beaux vers, si vous voulez me toucher.
Vers 38. Los témoins sont ouïs, son procès c>t tout fait, etc.
Ce n'est pas la peine d'écrire en vers quand on se permet un style si commun ; ce n'est là que rimer de la prose triviale. Il y a dans cette scène quelques mouvements de passion, quelques combats du cœur; mais qu'ils sont mal exprimés! Il semble qu'on ait applaudi dans cette pièce plutôt ce que les acteurs de- vaient dire que ce qu'ils disent, plutôt leur situation que leurs discours. C'est ce qui arrive souvent dans les ouvrages fondés sur les passions : le cœur du spectateur s'y prête à l'état des per- sonnages, et n'examine point. Ainsi tous les jours nous nous attendrissons à la vue des personnes malheureuses, sans faire attention à la manière dont elles expriment leurs infortunes.
SCÈNE III.
Vers 10. Dans un projet coupable il le fait affermi.
On ne peut guère écrire plus mal ; mais le rôle de Cécile est plus mauvais que ce style : il est froid, il est subalterne. Quand on veut peindre de tels hommes, il faut employer les couleurs dont Racine a peint Narcisse.
SCÈNE V.
Vers t. Comte, j'ai tout appris.
Cette scène était aussi difficile à faire que le fond en est tra- gique. C'est un sujet accusé d'avoir trahi sa souveraine, comme Cinna ; c'est un amant convaincu d'être ingrat envers sa souve-
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