Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome34.djvu/461

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Vous devriez bien m’envoyer le discours populaire de Lefranc ; je m’intéresse beaucoup à lui depuis qu’il a fait doublement cocu un intendant. En vérité, cela est fort à l’honneur des belles-lettres ; mais, mon cher ami, cela n’est point à l’honneur des lettres de cachet, et je trouve fort mauvais qu’on exile les gens pour avoir … madame ***.

Vous verrez ci-jointe la lettre[1] d’une bonne âme à Orphée-Rameau sur Zoïle-Castel.

· · · · · · · · · · · · · · · Secretum petimusque damusque vicissim.

(Hor., de Art. poet., v. 11.)

Ce Castel-là est un chien enragé ; c’est le fou des mathématiques, et le tracassier de la société.

Je vous enverrai incessamment la Mérope ; mais, pour Dieu, n’en parlez pas ; n’allez pas aussi vous imaginer que cela soit écrit du ton de Brutus.

Telephus et Peleus, cum pauper et exul uterque,
Projicit ampullas
· · · · · · · · · · · · · · ·

(Hor., de Art. poet., v. 96.)

Dieu garde Zaïre d’être autre chose que tendre ! Dieu garde Mérope de faire la Cornélie ! Flebilis Ino[2]. Vous ne verrez là d’autre amour que celui d’une mère, d’autre intrigue que la crainte et la tendresse, trois personnages principaux, et voilà tout. La plus extrême simplicité est ce que j’aime ; si elle dégénère en platitude, vous en avertirez votre ami.

Je serais bien étonné que mes Éléments de Newton parussent. La copie que j’avais laissée en Hollande était assez informe ; ce qu’ils avaient commencé de l’édition était encore plus vicieux. J’ai averti les libraires de ne se pas presser, de m’envoyer les feuilles, d’attendre les corrections ; s’ils ne le font pas, tant pis pour eux. Deux personnes[3] de l’Académie des sciences ont vu l’ouvrage, et l’ont approuvé. Je suis assez sûr d’avoir raison. Si les libraires ont tort, je les désavouerai hautement.

Monsieur le chancelier a trouvé que j’étais un peu hardi de soupçonner le monde d’être un peu plus vieux qu’on ne dit ; cependant je n’ai fait que rapporter les observations astronomiques de MM. de Louville et Godin. Or, par ces observations, il apparaît que notre pôle pourrait bien avoir changé de place

  1. Voyez plus haut la lettre 843.
  2. Horace, de Arte poet., 123.
  3. MM. Pitot et Montcarville. Ce dernier n’était pas de l’Académie des sciences.