Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome34.djvu/476

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ceur de vous embrasser avant votre départ. Je ne pourrai pas dire à Mme d’Argental tout ce que je pense de son cœur et du vôtre. Vous serez tous deux heureux à Saint-Domingue ; il n’y aura que vos amis à plaindre. J’embrasse tendrement M. de Pont-de-Veyle, à qui je suis attaché comme à vous.


859. — À M. THIERIOT.
À Cirey, le 5 mai.

Mon cher ami, je vous ai envoyé un chiffon pour vous et monsieur votre frère, et un gros paquet pour le fils du roi des géants. Je ne sais si je pourrai prendre le jeune homme qui a appartenu à Mme Dupin. On m’a, je crois, arrêté un jeune mathématicien très-savant et très-aimable. En ce cas, ce ne sera pas lui qui sera auprès de moi, mais bien moi auprès de lui ; je lui appartiendrai, et je le payerai.

Vraiment j’ai bien d’autres affaires que d’imprimer des épîtres en vers.

I nunc et versus tecum meditare canoros.

(Hor., lib. II, ep. ii, v. 76.)

Le débit précipité de mes Éléments de Newton m’occupe très-désagréablement. Le titre charlatan que d’imbéciles libraires ont mis à l’ouvrage est ce qui m’inquiète le moins. Cependant je vous prie de détromper sur ce point ceux qui me soupçonneraient de cette affiche ridicule.

Je vous avoue que je serais fort aise que l’ouvrage parût à Paris, purgé des fautes infinies que les éditeurs hollandais ont faites. Je suis persuadé que l’ouvrage peut être utile. Je serai auprès de M. de Maupertuis ce que c’est Despautère auprès de Cicéron ; mais je serai content si j’apprends à la raison humaine à bégayer les vérités que Maupertuis n’enseigne qu’aux sages. Il sera le précepteur des hommes, et moi des enfants ; Algarotti le sera des dames, mais non pas de Mme du Châtelet, qui en sait au moins autant que lui, et qui a corrigé bien des choses dans son livre[1].

Je vous réponds qu’avec un peu d’attention un esprit droit me comprendra. Tâchez de recueillir les sentiments, et d’informer le monde qu’on ne doit m’imputer ni le titre ni les fautes glissées

  1. Il Newtonianismo per le Dame, ovvero dialoghi sopra la Luce e i Colori, in-4o, 1737.