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l’auteur et celle à qui il est dédié. Les libraires de Hollande sont, comme ceux de Paris, des ingrats ; je leur ai fait présent du manuscrit, et ils ne m’ont pas envoyé un exemplaire.

Souffrez, au moins, que je vous rembourse de ceux que vous achetez. Vous êtes charmant de diriger un peu ma nièce ; si vous la trouvez aimable, je l’aimerai bien d'avantage. Je vais lui écrire.

Non-seulement je ne suis point l’auteur des Èpîtres, mais je suis outré contre ceux qui me les attribuent ; et je regarde votre fermeté à repousser cette injure comme une des plus fortes preuves de votre amitié.

Mme  la marquise du Châtelet vous fait bien des amitiés. Quand nous vous posséderons, nous vous parlerons à fond du prince et de nos vues sur vous : vivez seulement. Adieu. Je vous embrasse.


867. — À M. BERGER.
À Cirey, le 14 mai.

Il y a longtemps, monsieur, qu’on m’impute des ouvrages que je n’ai jamais vus ; je viens enfin de voir ces trois Épîtres en question. Je puis vous assurer que je ne suis point l’auteur de ces sermons. Je conçois fort bien que le portrait de l’abbé Desfontaines est peint d’après nature[1] ; mais, de bonne foi, suis-je le seul qui connaisse, qui déteste, et qui puisse peindre ce misérable ? Y a-t-il un homme de lettres qui ne pense ainsi sur son compte ? Je ne veux imputer ces Épîtres à personne ; mais, s’il était question d’en deviner l’auteur, je crois que je trouverais aisément le mot de cette énigme. Tout ce qui m’importe le plus est de ne pas passer pour l’auteur des ouvrages que je n’ai pas faits. Le peu de connaissance que j’ai depuis quatre ans dans le monde fait que je ne peux deviner les allusions dont vous me parlez ; mais il suffit qu’on fasse des applications malignes pour que je sois au désespoir qu’on m’attribue un écrit qui a donné lieu à ces applications. J’ai toujours détesté la satire ; et, si j’ai de l’horreur pour Rousseau et pour Desfontaines, c’est parce qu’ils sont satiriques, l’un en vers très-souvent durs et forcés, l’autre en prose sans esprit et sans génie. Je vous prie, au nom de la vérité et de l’amitié, de détromper ceux qui penseraient que j’aurais la moindre part à ces Èpîtres.

Il y a longtemps que je ne m’occupe uniquement que de

  1. Voyez, tome IX, la variante du vers 94 du troisième Discours sur l’Homme.