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Adieu, monsieur ; quand vous retournerez au midi, souvenez-vous qu’il y a dans Bruxelles deux personnes qui vous admireront et vous aimeront toujours.


1402. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
À Bruxelles, ce 19 de janvier.

Je reçois votre lettre, mon cher et respectable ami. Je veux absolument que vous soyez content de ma conduite et de Mahomet. Si vous saviez pourquoi j’ai été obligé d’aller à Berlin, vous approuveriez assurément mon voyage. Il s’agissait d’une affaire[1] qui regardait la personne même qui s’est plainte. Elle était à Fontainebleau ; elle devait passer du temps à Paris, et j’avais pris mon temps si juste que, sans les accidents de mon voyage, les débordements des rivières, et les vents contraires, je serais retourné à Bruxelles avant elle. Ses plaintes étaient très-injustes, mais leur injustice m’a fait plus de plaisir que les cours de tous les rois ne pourraient m’en faire. Si jamais je voyage, ce ne sera qu’avec elle et pour vous.

J’ai reçu des lettres charmantes de Silésie. C’est assurément une chose unique qu’à la tête de son armée il trouve le temps d’écrire des lettres d’homme de bonne compagnie. Il est fort aimable, voilà ce qui me regarde ; pour tout le reste, cela ne regarde que les rois. Je vous avais écrit un petit billet jadis, dans lequel je vous disais Il n’a qu’un défaut[2]. Ce défaut pourra empêcher[3] que les douze Césars n’aillent trouver le treizième. Le Knobelsdorff[4], qui les a vus à Paris, a soutenu qu’ils ne sont pas de Bernin et j’ai peur qu’on ne soit aisément de l’avis de celui qui ne veut pas qu’on les achète (ceci soit entre nous) ; Algarotti promet plus qu’il n’espère. Cependant, si on pouvait prouver et bien prouver qu’ils sont de Bernin, peut-être réussirait-on à vous en défaire dans cette cour. Mais quand sera-t-il chez lui ? et qui peut prévoir le tour que prendront les affaires de l’empire ? Je songe, en attendant, à celles de Mahomet ; et voici ma réponse à ce que vous avez la bonté de m’écrire.

1° Pour la scène du quatrième acte, il est aisé de supposer que les deux enfants entendent ce que dit Zopire cela même est

  1. Le procès de Mme du Châtelet.
  2. Voltaire parle de l’avarice de Frédéric dans la lettre 1317, au sujet des bustes des douze Césars cités ici. Voyez aussi, tome XXXV, la note 1 de la page 547.
  3. Voyez la fin de la lettre 1375.
  4. Voyez une note sur la lettre 738.