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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/292

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Richelieu. À l’égard de la pastorale, qui sert de divertissement au second acte de la fête dauphine, vous pouvez la garder M. de Richelieu en a déjà un exemplaire. Vous verrez, mes chers anges, que, si j’ai perdu mon temps à Cirey, ce n’est pas à ne rien faire ; aussi j’ai fait graver sur la porte de ma galerie :

Asile des beaux-arts, solitude où mon cœur
Est toujours occupé dans une paix profonde,
C’est vous qui donnez le bonheur
Que promettait en vain le monde[1].

Cela veut dire que votre amie est presque toujours dans la galerie.

Ne vous lassez point de moi, mes anges armez-vous de courage, car, dès que j’aurai fini l’ambigu du dauphin, je vous sers d’une fausse Prude[2], revue et corrigée, qu’il faudra bien que vous aimiez. Quoi ! faudra-t-il que l’opéra soit toujours fade, et la comédie toujours larmoyante ? et l’histoire un chaos de faits mal digérés, une gazette de marches et de contre-marches ? Je veux mettre ordre à tout cela avant de mourir. Les récompenses seront pour les autres, et le travail pour moi. Mais Cirey et votre amitié consolent de tout. Ce Cirey est un bijou, et n’a pas besoin de l’être : il n’a besoin que de vous posséder.

Je me mets toujours à l’ombre de vos ailes, et vous suis tendrement attaché, à vous, mes deux anges, et à M. de Pont-de-Veyle, quoiqu’il me mette moins sous ses ailes que vous. Valete.


1647. — À LA PRINCESSE ULRIQUE DE PRUSSE[3].
À Cirey en Champagne, ce 1er mai 1744.

Le prélat de Lubeck sur le trône élevé
Vivra donc comme j’ai rêvé.
Ah ! que lui servirait la grandeur souveraine ?
Quel triste et froid bonheur s’il n’était votre époux ?
Il faut, quand on est roi, vous obtenir pour reine,
Et quand on est sujet, il faut l’être de vous.

  1. Ce quatrain, gravé effectivement sur l’un des côtés de la porte cintrée de la galerie servant jadis de cabinet de physique à Voltaire, est au-dessous du distique latin imprimé dans les Poésies mêlees. Je pris copie exacte de ces vers, en 1821 et 1827. On lit demeuré, au lieu d’occupé, dans le second vers du quatrain, et promettrait, au lieu de promettait, dans le quatrième. (Cl.)
  2. Voyez tome IV, page 389.
  3. Éditeur, V. Advielle.