et qui souhaitent à Votre Majesté un règne heureux, la voix d’un ancien serviteur se fasse entendre.
Que ne puis-je ressembler à Descartes, qui alla se mettre aux pieds de Christine ! Souffrez qu’au moins je présente un tribut à Votre Majesté : c’est un recueil[1] qu’on s’est avisé d’imprimer à Dresde, et dont j’ai corrigé toutes les fautes à la main ; il est rempli d’additions et de changements. Il n’y a au monde que deux exemplaires ainsi corrigés, l’un pour un héros digne d’être votre frère, l’autre pour son auguste sœur. C’est par cette rareté seule que cet ouvrage mérite peut-être d’être honoré d’une place dans la bibliothèque de Votre Majesté. Si on veut admirer ce qui est rare en effet par soi-même, et ce qui est d’un prix inestimable, il faut ou aller à Stockholm ou être à Potsdam. Il y a longtemps que j’ai vu une épître charmante que l’Apollon de Prusse a faite pour la Pallas de Suède. Après un tel tribut payé par une divinité à une autre, comment un profane oserait-il parler, soit en vers, soit en prose ?
Je suis avec le plus profond respect, madame, de Votre Majesté le très-humble et très-obéissant serviteur.
Mme Denis, nièce de M. de Voltaire, demeurant chez lui, rue Traversière, et pendant son absence chargée de ses affaires à Paris, au retour d’un petit voyage qu’elle a fait à la campagne, a appris que le nommé Longchamp[2], valet de chambre de M. de Voltaire, et son copiste ordinaire, ayant la clef de son cabinet et de ses armoires, a profité de l’absence de ladite dame pour enlever de la maison plusieurs caisses de livres et des manuscrits. Mme Denis étant obligée de veiller à la conservation des effets de monsieur son oncle, demande que visite et saisie soient faites de tous les papiers qui se trouvent chez ledit Longchamp ; et comme ce Longchamp est étroitement lié avec les nommés Lafond[3] mari et femme, ci-devant domestiques de feu Mme la mar-
- ↑ La lettre de Voltaire était accompagnée d’un exemplaire de ses Œuvres, édition de Dresde, 1748-1750.
- ↑ Longchamp, marchand en boutique de cartes de géographie, loge rue Saint-Jacques, près la fontaine Saint-Severin, à l’enseigne de la Place des Victoires, à côté du Pavillon. (Note de madame Denis.)
- ↑ Lafond, mari et femme, logent, au troisième ou quatrième, rue de la Monnaie, près le Pont-Neuf, chez la demoiselle Alexandre, marchande de modes. (Note de madame Denis.)