l’histoire ; on se moque des sottises du genre humain et de la charlatanerie de vos physiciens qui croient avoir mesuré la terre[1], et de ceux qui passent pour des hommes profonds parce qu’ils ont dit qu’on fait des anguilles[2] avec de la pâte aigre.
On plaint ce pauvre genre humain qui s’égorge dans notre continent à propos de quelques arpents de glace en Canada. On est libre comme l’air depuis le matin jusqu’au soir. Mes vergers, et mes vignes, et moi, nous ne devons rien à personne. C’est encore là ce que je voulais, mais je voudrais aussi être moins éloigné de vous ; c’est dommage que le pays de Vaud ne touche pas à la Touraine.
Adieu, Tithon et l’Aurore[3]. Avez-vous gagné vos soixante et neuf ans au métier de Tithon ? Je vous embrasse tendrement.
J’ai reçu et lu, mon cher et illustre philosophe, l’article Liturgie. Il faudra changer un mot dans les Psaumes, et dire : « Ex ore sacerdotum perfecisti laudem[5], Domine. » Nous aurons pourtant bien de la peine à faire passer cet article, d’autant plus qu’on vient de publier une déclaration qui inflige la peine de mort[6] à tous ceux qui auront publié des écrits tendants à attaquer la religion ; mais, avec quelques adoucissements, tout ira bien, personne ne sera pendu, et la vérité sera dite. J’ai fait vos compliments à mon camarade, qui vous remercie de tout son cœur, et qui compte vous faire lui-même les siens en vous écrivant incessamment. Je suis charmé que vous ayez quelque satisfaction de notre ouvrage. Vous y trouverez, je crois, presque en tout genre d’excellents articles. Il y en a dont nous ne sommes pas plus contents que vous ne le serez ; mais nous n’avons pas toujours été les maîtres de leur en substituer d’autres. À tout prendre, je crois que l’ou-
- ↑ Maupertuis.
- ↑ Needham ; voyez tome XXVII, page 159.
- ↑ Allusion aux vers de Moncrif intitulés le Rajeunissement inutile, ou les Amours de Tithon et de l’Aurore.
- ↑ Cette lettre est, au plus tôt, de la fin de mars, le mandement dont on y parle étant du 21 mars 1757.
- ↑ « Ex ore infantium et lactenlium perfecisti laudem, propter inimicos tuos, ut destruas inimicum et ultorem. » (Psaume viii, v. 3.)
- ↑ Le parlement demandait une loi pour punir de mort les auteurs de brochures contre les jésuites ; et l’avocat général Joly de Fleury attendait très-impatiemment cette loi, si digne de son aveugle intolérance. Grimm en dit un mot dans sa Correspondance littéraire du 1er mai 1757. (Cl.)