Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome39.djvu/262

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pas réussi dans un temps peut réussir dans un autre, et chaque chose a son point de maturité. Je n’ajoute aucune réflexion ; je crois seulement devoir vous dire que, dans le cas où l’on puisse résoudre le roi de Prusse à remettre tout entre vos mains, ce ne sera que par madame la margrave sa sœur qu’on pourra y réussir.

J’espère que ma lettre ne sera pas prise par des housards prussiens ou autrichiens ; je ne signe ni ne date. Vous connaissez mon ermitage ; j’ose vous supplier de m’écrire seulement quatre mots qui m’instruisent que vous avez reçu ma lettre.

J’ai eu l’honneur de mettre sous votre protection une lettre pour Mme  la duchesse de Saxe-Gotha. Plus d’une armée mange son pauvre pays, et, tout galant que vous êtes, vous y avez quelque part. Vous ne pouvez toujours contenter toutes les dames.

Permettez que j’ajoute que vous avez parmi vos aides de camp un comte de Divonne[1], mon voisin, qu’on dit très-aimable, et très-empressé à vous bien servir. Vous êtes très-bien en médecins et en aides de camp. Ils sont bien heureux. Que ne puis-je, comme eux, être à portée de voir mon héros !


    paix à l’Europe. Ce sera, sans contredit, le plus beau de vos lauriers. Travaillez-y, monsieur, avec cette activité qui vous fait faire des progrès si rapides, et soyez persuadé que personne ne vous en aura plus de reconnaissance, monsieur le duc, que votre fidèle ami,


    Fédéric

    Réponse de M.  le maréchal de Richelieu au roi de Prusse.

    Sire, quelque supériorité que Votre Majesté ait en tout genre, il y aurait peut-être beaucoup à gagner pour moi de négocier, plutôt qu’à combattre vis-à-vis un héros tel que Votre Majesté. Je crois que je servirais le roi mon maître d’une façon qu’il préférerait à des victoires si je pouvais contribuer au bien d’une paix générale. Mais j’assure Votre Majesté que je n’ai ni instructions ni notions sur les moyens d’y pouvoir parvenir.

    Je vais envoyer un courrier pour rendre compte des ouvertures que Votre Majesté veut bien me faire, et j’aurai l’honneur de lui rendre la réponse de l’affaire dont je suis convenu avec M.  Delchetet.

    Je sens, comme je le dois, tout le prix des choses flatteuses que je reçois d’un prince qui fait l’admiration de l’Europe, et qui, si j’ose le dire, a fait encore plus la mienne particulière. Je voudrais bien au moins pouvoir mériter ses bontés en le servant dans le grand ouvrage qu’il parait désirer, et auquel il croit que je peux contribuer ; je voudrais surtout pouvoir lui donner des preuves du profond respect avec lequel je suis, etc. (K.)

  1. Divonne est une commune située entre Prangins et Gex.