aurait été fait par un prêtre, et cela eût été plaisant ; j’aime pourtant mieux ne pas entendre votre éloge sitôt, dût-il être fait par le frère Berthier, ou par M. de Pompignan.
Il faudrait imprimer, à la suite du Discours de notre nouveau confrère, une épître[1] que je viens de recevoir du roi de Prusse contre les fanatiques ; les dévots, les jésuites, et notre saint-père le pape, y sont bien traités.
Adieu, mon cher et grand philosophe ; vivez longtemps, et portez-vous bien, tout mort que vous êtes.
P. S. Il ne manquait plus à la philosophie que le coup de pied de l’âne. On va jouer sur le théâtre de la Comédie française une pièce intitulée les Philosophes modernes[2]. Préville doit y marcher à quatre pattes, pour représenter Rousseau. Cette pièce est fort protégée. Versailles la trouve admirable.
Puisque vous êtes si grand maître
Dans l’art des vers et des combats,
Et que vous aimez tant à l’être,
Rimez donc, bravez le trépas ;
Instruisez, ravagez la terre ;
J’aime les vers, je hais la guerre.
Mais je ne m’opposerai pas
À votre fureur militaire.
Chaque esprit a son caractère ;
Je conçois qu’on a du plaisir
À savoir, comme vous, saisir
L’art de tuer et l’art de plaire.
Cependant ressouvenez-vous de celui[3] qui a dit autrefois :
Et quoique admirateur d’Alexandre et d’Alcide,
J’eusse aimé mieux choisir les vertus d’Aristide.
Cet Aristide était un bon homme ; il n’eût point proposé de faire payer à l’archevêque[4] de Mayence les dépens et dommages de quelque pauvre ville grecque ruinée. Il est clair que Votre
- ↑ Épitre à d’Alembert ; voyez une des notes sur la lettre 4112.
- ↑ Comédie de Palissot, jouée le 2 mai suivant.
- ↑ Dans son Épître à mon esprit (v. 289-290), le roi de Prusse avait dit :
Mais quoique admirateur de César et d’Alcide,
J’aurais suivi par goût les vertus d’Aristide. - ↑ Jean-Frédéric-Charles, mort en 1763 ; voyez tome XIII, page 209.