Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/354

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il s’agit des principes de l’art. Cet art est, à la vérité, fort vilain ; mais il est nécessaire. Le prince Louis de Wurtemberg, que vous avez vu à Berlin, a renoncé à cet art comme au roi de Prusse, et est venu s’établir dans mon voisinage. Nous avons des neiges, j’en conviens ; mais nous ne manquons pas de bois. On a des théâtres chez soi, si on en manque à Genève ; on fait bonne chère ; on est le maître de son château ; on ne paye de tribut à personne : cela ne laisse pas de faire une position assez agréable. Vous, qui aimez à courir, je voudrais que vous allassiez de Pise à Gênes, de Gênes à Turin, et de Turin dans mon ermitage ; mais je ne suis pas assez heureux pour m’en flatter.

Buona notte, caro cigno di Pisa !


5145. — À M. DEBRUS[1].
18 janvier 1763.

J’ai l’honneur de vous adresser, monsieur, une petite réponse que je dois à Mlles Calas, qui ont bien voulu m’écrire. J’attends tout de l’intégrité des juges du conseil, et surtout du cri public.

Nous avons des ennemis. Un conseiller au parlement de Paris disait ces jours passés à un de nos avocats que notre requête ne serait point admise, parce qu’il y a plus de magistrats que de Calas. J’espère qu’un discours si insolent, si tyrannique et si absurde, sera aussi vain qu’il est condamnable, et je voudrais qu’il fût public, afin de forcer les juges du conseil à faire voir à la France indignée qu’ils n’immolent pas l’innocence au faux honneur de quelques magistrats indignes de l’être.


5146. — À MESDEMOISELLES CALAS[2].

Je vous réponds, mesdemoiselles, sur du papier orné de fleurs[3], parce que le temps des épines est passé, et qu’on rendra justice à votre respectable mère et à vous. Je vous félicite d’être auprès d’elle. Je me flatte que votre présence a touché tous les juges, et qu’on réparera l’abomination de Toulouse. Je vois avec un extrême plaisir que le public s’intéresse à vous aussi vivement

  1. Éditeur, A. Coquerel. — L’adresse est : « A monsieur, monsieur de Brus, à Genève. »
  2. Éditeur, A. Coquerel.
  3. Cette lettre est écrite sur une feuille de papier dont chaque page est encadrée de fleurs et ornée d’un œillet à chaque coin.