Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/423

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Omer et les Chaumeix, elle l’est par les libraires ? est-il vrai que la mauvaise foi et l’avarice aient succédé à la superstition, pour anéantir cet ouvrage ? Si cela est, ne pourrait-on pas renouer avec l’impératrice de Russie ? Après tout, si les auteurs sont en possession de leurs manuscrits, ils n’ont qu’à aller où ils voudront. La véritable manière de faire cet ouvrage en sûreté était de s’en rendre entièrement le maître, et d’y travailler en pays étranger. Je plains bien le sort des gens de lettres : tantôt un Omer leur coupe les ailes, et tantôt des fripons leur coupent la bourse.

Est-il vrai que M. Saurin aura le poste que Catherine destinait à mon frère d’Alembert ? En ce cas, ce poste serait toujours occupé par un frère, et il y aurait de quoi lever les mains au ciel en action de grâces, tandis qu’à Paris on lève les épaules sur les Pompignan et sur les Le Brun, et sur tant d’autres misères.

On demande dans les provinces des Sermons[1] et des Meslier[2] ; la vigne ne laisse pas de se cultiver, quoi qu’on en dise.

Mon frère Thieriot est prié de me dire combien il y a encore de petits Corneilles dans le monde ; il vient de m’en arriver un qui est réellement arrière-petit-fîls de Pierre, par conséquent très-bon gentilhomme. Il a été longtemps soldat et manœuvre ; il a une sœur cuisinière en province, et il s’est imaginé que Mlle  Corneille, qui est chez moi, était cette sœur. Il vient tout exprès pour que je le marie aussi ; mais comme il ressemble plus à un petit-fils de Suréna et de Pulchérie qu’à celui de Cornélie et de Cinna, je ne crois pas que je fasse sitôt ses noces.

J’embrasse tendrement mon frère. Je suis aveugle et malingre. Écr. l’inf…


5219. — À M.  LE CARDINAL DE BERNIS.
Aux Délices, le 7 mars.

Votre Éminence, monseigneur, doit avoir reçu une lettre[3] du pauvre Tirésie, adressée à Vic-sur-Aisne, pendant qu’elle daignait me faire des reproches de mon silence. Vous êtes englobé dans l’Académie française, qui a daigné signer en corps au mariage de notre Marie Corneille.

Il faut, pour vous amuser, que M. Duclos vous envoie l’Héraclius espagnol, dont on dit que Corneille a tiré le sien ; vous rirez, et il est bon de rire.

  1. Sermon des Cinquante ; voyez tome XXIV, page 437.
  2. Voyez ibid., page 293.
  3. Celle du 25 février, n° 5204.