Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/471

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que de brûler un livre. Un Chaumeix, un Gauchat, n’ont qu’à recueillir, falsifier, empoisonner quelques phrases, et donner un extrait calomnieux à un Omer ; Omer fera son réquisitoire, et des hommes extrêmement ignorants condamneront au brasier un livre qu’ils n’auront pas lu. À la bonne heure, les Cramer n’en seront pas fâchés ; mais moi, si mon nom est à la tête d’une histoire sage et instructive, je suis décrété en personne, et mes biens confisqués si je ne comparais pas devant messieurs. Or c’est ce qui est absolument inutile. Je veux bien qu’on décrète un quidam qui pouvait prouver que le parlement n’a aucun droit de faire des remontrances que par la pure concession des rois, et qui ne l’a pas dit ; qui pouvait prouver que les enregistrements ne viennent que des regesta, des compilations qu’on s’avisa de faire sous Philippe le Bel, des olim, de l’habitude enfin qu’on prit de tenir registre (habitude qui succéda au trésor des Chartres) ; qui pouvait éclaircir cette matière, et qui ne l’a pas fait. On peut brider une histoire dans laquelle la conduite du parlement est toujours ménagée ; on peut brûler ce livre par arrêt du parlement, cela est dans l’ordre ; mais je ne veux pas être brûlé en effigie. N’êtes-vous pas de mon avis ?

Mes anges, un petit mot d’Olympie, et je finis. Un homme qui a été à moi[1], qui a été volé à Francfort avec moi, l’a imprimée à ses dépens ; c’est un plaisir que je lui devais. Serait-il juste d’empêcher son édition d’entrer en France, et de le priver du fruit de ses avances ? Je m’en rapporte à vos cœurs angéliques.

Vous m’avez, j’en suis sûr, trouvé sombre, chagrin dans mon épître. Je ne sais pourquoi je suis triste, car votre humeur est toujours égale, et je voudrais vous imiter. Je crois que c’est parce que le vent du nord souffle ; mais je suis à vous à tout vent, ô anges !

Respect et tendresse.


5271. — À. M. COLINI.
26 avril.

Mon cher historiographe, j’ai reçu votre petit paquet, et je vous en remercie. Je vous prie de me faire un second envoi, et de régaler Mme de Fresney d’un exemplaire. Ayez la bonté de lui écrire un petit mot ; cette attention l’engagera à me faire tenir les paquets sans se rebuter.

  1. Colini.