Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/555

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’on imprime à Paris beaucoup de sottises, mais qu’on ne peut y en faire entrer aucune. On y a imprimé sous mon nom une prétendue tragédie anglaise intitulée Saül, que je n’ai jamais vue. Je reçois assez régulièrement votre Journal, qui m’instruit et m’amuse ; je souhaite qu’il vous soit aussi utile qu’il m’est agréable. Je ne suis guère occupé que d’agriculture cet été ; mais si je peux trouver quelque chose digne d’entrer dans votre greffe, et quelque manière de vous l’envoyer, je m’en ferai un vrai plaisir. J’ai l’honneur d’être, etc.

N. B. On vous a mal informé quand on vous a mandé que le parlement de Dijon conservait les jésuites : ils sont tous renvoyés, et j’ai fait la bouffonnerie d’en prendre un pour aumônier[1].


5375. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
16 auguste.

J’envoie à mes divins anges la lettre de M. Douet ou Drouet, fermier général, lequel fermier paraît n’avoir point du tout d’envie de donner au neveu de Pierre Corneille un nouvel emploi ; et il le trouve posté à merveille au port Saint-Nicolas. Tout ce que je souhaite, c’est de voir un Drouet mesurer du bois et du charbon, et un Corneille fermier général.

On m’a envoyé des choses assez plaisantes sur les sept cent quarante millions de M. Roussel[2]. Je l’avais pris d’abord pour le trésorier d’Aboul-Cassem. Messieurs les Parisiens doivent regorger d’or et d’argent.

Au reste, mes anges voient que j’ai un peu d’occupation ; je les supplie très-instamment de m’excuser auprès de M. de La Marche si je n’ai pas l’honneur de lui écrire. Je n’ai pas eu encore le temps d’écrire à M. de Chauvelin ; à peine ai-je celui de vaquer à mes petites affaires. Un pauvre laboureur est bien empêché quand il faut faire des tragédies, et des commentaires sur des tragédies : c’est bien pis pour l’histoire ; le pauvre homme n’en peut plus, il demande quartier.

Je baise humblement le bout de vos ailes, mes anges.

  1. Addition d’après l’original, qui est à la Bibliothèque royale de Belgique sous le n° 11582, communiquée par M. F. Brunetière.
  2. Voyez page 499.