Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/68

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ment de Toulouse, il juge ; il vient de condamner un ministre de mes amis à être pendu[1], trois gentilshommes à être décapités, et cinq ou six bourgeois aux galères, le tout pour avoir chanté des chansons de David. Ce parlement de Toulouse n’aime pas les mauvais vers.

Je baise vos ailes avec componction.


4853. — À M.  LEKAIN.
À Ferney, 2 mars.

Mon cher grand acteur, est-il vrai que nous aurons le bonheur de vous voir devers Pâques ? Nous communierons ensemble, et nous prendrons des mesures pour faire de Zulime, de Cassandre, etc., etc., quelque chose qui puisse vous être agréable et utile. J’interromps une répétition pour vous dire que toute notre troupe, et surtout Mme  Denis et moi, nous vous faisons les plus tendres et les plus sincères compliments. V.


4854. — À M.  LE CARDINAL DE BERNIS.
À Ferney, ce 5 mars.

Oui, monseigneur, ceux qui disaient, quand vous fûtes ministre pour trop peu de temps : Celui-là du moins sait lire et écrire, avaient bien raison. Votre Éminence daigne se souvenir de Cassandre, et me donne un excellent conseil, que je vais sur-le-champ mettre en pratique. Vous jugez encore mieux Cinna ; rien n’est mieux dit : C’est plutôt un bel ouvrage qu’une bonne tragédie. Je souscris à ce jugement. Nous n’avons guère de tragédies qui arrachent le cœur ; c’est pourtant ce qu’il faudrait.

Vous savez peut-être ce qui arriva à Tancrède, il y a huit ou dix jours ; je ne dis pas que ce Tancrède arrache l’âme, ce n’est pas cela dont il s’agit ; il y a des vers ainsi tournés :


On dépouille Tancrède, on l’exile, on l’outrage ;
C’est le sort d’un héros d’être persécuté.

(Acte I, scène VI.)

Tout le monde battit des mains, on cria Broglie ! Broglie ! et les battements recommencèrent ; ce fut un bruit, un tapage,

  1. Il veut sans doute parler de Rochette, qui avait été pendu le 18 février ; voyez une note sur la lettre 4719.