Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome43.djvu/391

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ci-joint à M. Corneille. Le marquis[1] est arrivé, et il a bien promis d’envoyer les feuilles qu’on demande ; et je ne doute pas que le prince[2] et le marquis n’ordonnent à leurs principaux officiers de faire les recherches nécessaires dans leur chancellerie ; moyennant quoi l’héritière du nom de Corneille peut se flatter de recevoir dans quelques mois un paquet scellé du grand sceau.

Mes anges m’avaient tenu le cas secret sur les Lettres secrètes[3] ; je ne les ai point lues. C’est un nommé Robinet, qui est allé exprès à Amsterdam. Je ne crois pas que son entreprise lui paye son voyage. Il prétend aussi faire imprimer ma correspondance avec le roi de Prusse ; en ce cas, il publiera de bien mauvais vers. Vous croyez bien que j’entends les miens, car ceux d’un roi sont toujours bons.

Il me paraît que je ressemble assez à un homme dont le bien est à l’encan. On vend tous mes effets, comme si j’étais décédé insolvable ; et on fourre dans l’inventaire bien des choses qui ne m’appartiennent pas ; mais, comme je suis mort, ce n’est pas la peine de me plaindre.

Dieu bénisse les vivants, et qu’il accorde à mes anges la vie sempiternelle le plus tard qu’il pourra !


5826. — À M.  BERTRAND.
À Ferney, 21 novembre.

Mon cher philosophe, vous êtes un homme charmant, un bon ami, un philosophe véritable. L’article dont vous me parlez était d’un fripon, d’un délateur[4] et non pas d’un nouvelliste. Depuis quand est-il permis d’accuser les particuliers, de son autorité privée, dans des papiers publics ? Un tel abus est punissable.

Je n’ai nul commerce avec les auteurs de l’ouvrage[5] dont vous me parlez ; mais, quels qu’ils soient, ils seront pénétrés pour vous de reconnaissance. Présentez mes respects, je vous en prie, à MM. les comtes de Mnizek, J’ai l’honneur de faire réponse à monsieur le banneret[6] qui a eu la bonté de m’écrire.

Il vint dîner hier un damné avec moi, qui me soutint que la

  1. Surnom donné à Gabriel Cramer.
  2. Philibert, Cramer.
  3. Voyez tome XXV, page 579, et XXVI, 135.
  4. L’abbé d’Étrée ; voyez tome XXVI. page 136.
  5. Le Dictionnaire philosophique portatif.
  6. La lettre est perdue.