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depuis une trentaine d’années. L’insolence avec laquelle on a calomnié le Dictionnaire encyclopédique est sans exemple. Le malheureux[1] qui fournit des mémoires contre cet important ouvrage poussa l’absurdité jusqu’au point de dire que, si on ne découvrait pas le venin dans les articles déjà imprimés, on le trouverait infailliblement dans les articles qui n’étaient pas encore faits[2]. Cela me fait souvenir d’un abbé Desfontaines, écrivain de feuilles périodiques, qui, en rendant compte du Minute Philosopher du célèbre Berkeley, évêque de Cloyne, crut, sur le titre, que c’était un livre de plaisanteries contre la religion, et traita le vieil évêque de Cloyne comme un jeune libertin, sans avoir lu son ouvrage[3].

Ce Desfonfaines a eu des successeurs encore plus ignorants et plus méchants que lui, qui n’ont cessé de calomnier les véritables gens de lettres. Jamais la philosophie n’a été plus répandue, et jamais cependant elle n’a essuyé de plus cruelles injustices. Ce sont ces injustices mêmes qui augmentent l’obligation que je vous ai.

Je ne sais, monsieur, si Mme de Bouttourdin, à qui vous me dédiez, est sœur de M. le comte de Voronzof, que j’ai eu l’honneur de voir chez moi, et qui est actuellement ambassadeur à la Haye ; je vous supplie de vouloir bien lui présenter mes respects.

J’ai l’honueur d’être avec la plus sincère reconnaissance, monsieur, votre, etc.


6267. — À MADEMOISELLE CLAIRON[4].
Ferney, 12 février.

Je vois d’ici, mademoiselle, quel sera le résultat de l’assemblée de vos amis. J’en félicite le public ; mais tâchez que la Déclaration du roi, qu’on sollicite et qui est préparée par un excellent mémoire, soit donnée avant votre rentrée. Votre triomphe alors sera complet, et ce sera une grande époque dans l’histoire des beaux-arts. Je ne vois nul obstacle à cette Déclaration ; elle

  1. Abraham Chaumeix, auteur des Préjugés légitimes contre l’Encyclopédie, voyez tome XLI, page 115.
  2. Voltaire a fait usage de ce trait dans ses Dialogues chrétiens ; voyez tome XXIV, page 137.
  3. Voyez tome XXII, page 385.
  4. Éditeurs, de Cayrol et François.