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ANNÉE 1766.

Votre grand diable de Cosaque, qui dit avoir la poitrine perdue, est un fort bon homme. Il avait avec lui un médecin qui a du mérite.


6401. — DE M. HENNIN[1].
À Genève, … juillet.

J’étais fâché pour vous, monsieur, du dérangement que monsieur l’ambassadeur mettait à la marche du prince, mais vous avez été prévenu à temps.

Nous comptons, M. de Taulès et moi, être de la fête philosophique que vous vous proposez de donner demain. Mais dans ce siècle mangeur il n’y a plus moyen de penser à la sobriété. Ainsi, pour ma part, je compte sur une indigestion, sauf à la guérir au bal que la république doit donner ce soir.

Avez-vous vu la réponse qu’on a donnée à ces bonnes gens. Ils en sont tout ébaubis et ne conçoivent pas comment un roi de France peut parler ainsi à des citoyens de Genève. Ce serait bien pis s’ils savaient que M. le chevalier de Beauteville a pris sur lui cette tournure pour leur épargner de plus grands désagréments. Ils ne l’en détestent pas moins ; mais la crainte d’une malédiction injuste ne doit pas nous empêcher de faire notre devoir, quoi qu’en dise la sainte constitution.

Je présente mes respects à vos dames, et à vous, monsieur, mon cœur avec toute sa franchise et la tendresse dont il est capable.


6402. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
Aux eaux de Rolle en Suisse, par Genève, 14 juillet.

Mes chers anges, mettez-moi aux pieds de M. de Chauvelin ; dites-lui que je pense comme lui ; dites-lui que la pièce inspire je ne sais quoi d’atroce, mais qu’elle n’ennuie point ; qu’elle est un peu dans le goût anglais ; qu’on n’a eu d’autre intention que de dire ce qu’on pense d’Auguste et d’Antoine, et que d’ailleurs elle est assez fortement écrite.

Non vraiment je n’ai point ma minute ; je l’avais envoyée au libraire ; je ferai mon possible pour la retirer, et je vous conjure encore, par vos ailes, de me renvoyer ma copie, par la diligence de Lyon, à Meyrin, en belle toile cirée : c’est la façon dont il faut s’y prendre pour faire tenir tous les gros paquets. Vous verrez, par l’étrange lettre[2] que j’ai reçue d’un château près d’Abbeville, que vos dignes avocats ont encore bien plus fortement raison qu’ils ne pensaient. Il y a dans tout cela de

  1. Correspondance inédite de Voltaire avec P.-M. Hennin ; Paris, 1825.
  2. Un extrait est en note au bas de la lettre 6415.