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actrice ; vous en auriez été content dans une assez mauvaise pièce à la grecque, intitulée Oreste, et vous l’auriez écoutée avec plaisir, même à côté de Mlle  Clairon. Conservez-moi au moins vos bontés, si vous me refusez votre présence réelle.


6107. — À M.  LE COMTE D’ARGENTAL.
9 septembre.

Notre résident Montpéroux[1] vient de mourir ; à qui donnera-t-on cette place ? Je voudrais bien que ce fût à un philosophe. Plusieurs personnes la demandent. Je ne connais point du tout par moi-même M. Astier, qui est en Hollande, et qui a, dit-on, bien servi ; mais je sais qu’il est fort sage et fort paisible. Il est sans doute convenable de ne pas envoyer dans cette ville un bigot fanatique.

Je songe à ce pauvre Tercier[2], qui a perdu si mal à propos sa place pour avoir approuvé un livre médiocre, qui n’était que la paraphrase des Pensées de La Rochefoucauld. Si nous pouvions l’avoir, ce serait une grande consolation. Quoi qu’il en soit, je supplie instamment mes anges de nous envoyer un résident philosophe.

M. de Chauvelin, l’ambassadeur à Turin, m’a mandé qu’il vous enverrait la petite drôlerie de l’ex-jésuite ; mais à quoi vous servira-t-elle, mes divins anges ? Cet exemplaire est, à la vérité, un peu plus complet que le vôtre ; mais il y a encore beaucoup de choses à corriger. Ne vaudrait-il pas mieux renvoyer au petit prêtre sa guenille en droiture ? Je vous ai déjà dit que je recevais sans difficulté les paquets contre-signés qui m’étaient adressés[3] ? Et où serait le mal quand on enjoliverait ce paquet d’une demi-feuille de papier dans laquelle on écrirait : « Voilà ce que M. le duc de Praslin vous envoie ; il trouve vos vers fort mauvais, et vous recommande de les corriger, » ou telle autre chose semblable ? Il me semble que cette grande affaire d’État peut se traiter très-facilement par la poste ; on renverra le tout avec une préface des plus honnêtes, et toutes les indications nécessaires à l’ami Lekain.

Je suis toujours très-émerveillé de la défense qu’on a faite au

  1. Résident de France à Genève.
  2. Voyez la note, tome XXXIX, page 499.
  3. Lettre 6062.