Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome45.djvu/125

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Ces quatre vers me paraissent d’ailleurs nécessaires pour relever Athamare.

Je viens de faire partir pour M. d’Argental, sous l’enveloppe de M. le duc de Praslin, un exemplaire où ces quatre vers se trouvent avec quelques autres corrections qui m’ont paru essentielles ; je les recommande aux bontés de M. de Thibouville. Je suppose qu’il a bien voulu donner le rôle d’Obéide à Mlle Durancy, et qu’il voudra bien aussi lui donner ses conseils. Il me semble que ce rôle, joué avec la passion convenable, peut faire beaucoup d’honneur à l’actrice. Mais je défie tous les acteurs de jouer avec plus de sensibilité que mon cœur en ressent pour tous les soins que vous daignez prendre.

6749. — À M. SERVAN.
14 février.

Je ne peux, monsieur, vous remercier assez du discours que vous avez bien voulu m’envoyer. Si l’éloquence peut servir au bonheur des hommes, ils seront heureux par vous. Les cinquante dernières pages surtout m’ont ravi en admiration, et m’ont fait répandre des larmes d’attendrissement : sept à huit personnes qui étaient à Ferney ont éprouvé les mêmes transports.

Il me semble, monsieur, que vous êtes le premier homme public qui ait joint l’éloquence touchante à l’instructive : c’est, ce me semble, ce qui manquait à M. le chancelier d’Aguesseau ; il n’a jamais parlé au cœur ; il peut avoir défendu des lois, mais a-t-il jamais défendu l’humanité ? Vous en avez été le protecteur dans un discours qui n’a jamais eu de modèle ; vous faites bien sentir à quel point nos lois ont besoin de réforme. Elles seraient intolérables s’il ne se trouvait pas tous les jours dans les tribunaux des âmes éclairées et honnêtes qui en expliquent favorablement les contradictions, et qui en adoucissent la barbarie. Ce M. Pussort, qui rédigea l’ordonnance criminelle, était une âme bien dure ; voyez comme il insulta M. Fouquet dans sa prison, et avec quel acharnement il voulait le perdre ! Le premier président de Lamoignon ne fut jamais de son avis dans la rédaction de l’ordonnance.

Je ne sais, monsieur, si vous avez lu un petit Commentaire sur les Délits et les Peines, par un avocat de province[1] ; il y a quel-

  1. L’ouvrage est de Voltaire ; voyez tome XXV, page 539.