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6786. À M. DAMILAVILLE.
6 mars.

Voici, mon cher ami, un petit mot pour M. Lembertad[1]. J’ai fait réflexion à votre proposition de préparer la chose. J’ai trouvé le secret de glisser, au second acte, que les femmes dans ce pays-là vengent leurs maris quand on les a tués. Heureusement cela est dit tout naturellement et sans art. Je ne sais si on aura le temps de jouer cette rapsodie. Je voudrais vous envoyer du Lembertad[2], mais comment faire ? Bonsoir, mon cher ami.

6787. — À M. DE PEZAY.
À Ferney, 9 mars[3].

Je vous répondrai, monsieur, ce que j’ai répondu à M. Dorat, que je ne connais en aucune manière les vers dans lesquels il est maltraité, que personne au monde ne m’a rien écrit sur ce sujet ; et j’ajoute que je consens que vous me regardiez comme un malhonnête homme si je vous trompe. Je vous dirai plus : je n’ai jamais montré à Ferney ni les vers que M. Dorat avait faits contre moi, ni aucune des lettres qu’il m’écrivit depuis, et dans lesquelles la bonté de son cœur réparait, par son repentir, le tort que son imagination m’avait pu faire. Je n’ai pas seulement laissé voir la jolie épître qu’il vient d’adresser à sa muse ; je me suis contenté de goûter la satisfaction de voir avec combien de grâces il guérissait les blessures qu’il avait faites.

Ni Mme Denis, ni M. et Mme Dupuits, ni M. et Mme de La Harpe, qui sont chez moi depuis quatre mois, ni mes deux neveux, conseillers au parlement et au grand conseil, n’ont vu aucune de ces pièces. Les affaires qui regardent Rousseau sont ici trop sérieuses pour qu’elles puissent être des sujets de pure plaisanterie ; et de plus, monsieur, ces plaisanteries étaient trop cruelles pour qu’elles servissent de matière à nos conversations. M. Dorat, sans me connaître, m’avait traité de bouffon dans son Avis aux sages ; il m’avait exposé aux rigueurs du gouvernement en disant qu’on a brûlé des ouvrages qu’on m’attribue ; il finissait enfin par dire qu’il fallait avoir des mœurs.

  1. Ce petit mot pour d’Alembert manque.
  2. Voyez la note 2, page 150.
  3. Nous croyons que cette lettre est bien de 1767, et non, comme le dit Beuchot, de 1768. (G. A.)