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CORRESPONDANCE.

moi, je suis bien hardi de vous parler de musique, quand je ne dois songer qu’à des De profundis, qui ne seront pas même en faux bourdon.

Voudriez-vous avoir la bonté de m’envoyer une copie des paroles de Pandore, telles que vous les avez mises en musique ? Je tâcherai de rendre quelques endroits plus convenables à vos talents, et qui vous mettront plus à l’aise. Envoyez-moi ce manuscrit contre-signé ; cela vous sera très-aisé.

Adieu, mon cher et digne ami ; ne vous rebutez point. Quand un homme comme vous a entrepris quelque chose, il faut qu’il en vienne à bout. Le découragement n’est point fait pour le génie et pour le mérite. Combattez et triomphez. Ne parlez point surtout au maître des jeux[1] ; il est impossible qu’il fasse rien pour vous cette année ; je vous en avertis avec très-grande connaissance de cause. Ne manquez pas d’exécuter votre charmant projet de venir au 1er de juillet ; nous aurons des voix et des instruments. Je vous dirai franchement queMme Denis se connaît mieux en musique que tous les gens dont vous me parlez. Venez, venez, et je vous en dirai davantage.

6908. — À M. DAMILAVILLE.
4 juin.

Mon cher ami, faites d’abord mes compliments à la Sorbonne du service qu’elle nous a rendu : car les choses spirituelles doivent marcher devant les temporelles ; ensuite ayez la charité de reprendre l’affaire des Sirven. M. Chardon peut à présent rapporter l’affaire. Sirven est prêt à partir pour Paris ; je vous l’adresserai. Il faudra qu’il se cache, jusqu’à ce que son affaire soit en règle.

Je tremble pour celle de notre ami Beaumont ; on me mande qu’elle a un côté odieux, et un autre qui est très-défavorable. L’odieux[2] est qu’un philosophe, que le défenseur des Calas et des Sirven reproche à un mort d’avoir été huguenot, et demande que la terre de Canon soit confisquée, pour avoir été vendue à un catholique ; le défavorable est qu’il plaide contre des lettres patentes du roi. Il est vrai qu’il plaide pour sa femme, qui demande à rentrer dans son bien ; mais elle n’y peut rentrer qu’en cas que le roi lui donne la confiscation. Il reste à savoir si ce

  1. Richelieu.
  2. Voyez tome XLIV, page 454.