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ANNÉE 1767.
7069. — À M. DUPONT.
17 novembre.

Mon cher ami, j’écris quand je peux, et les lettres arrivent aussi quand elles peuvent : la vôtre du 7 novembre m’apprend qu’il y a encore un usurier qui me coupe l’herbe sous le pied ; je ne sais si cet usurier est juif ou chrétien ; vous me ferez plaisir de m’apprendre son nom. Le royaume des cieux est souvent comparé à l’usure dans saint Matthieu[1], dont le premier métier était d’être usurier.

Je vois que le sieur Jean Maire s’est toujours moqué de moi, et ne m’a jamais dit un mot de vérité. J’ai écrit à la chambre des finances de Montbéliard[2], et je lui ai fait proposer de me payer moitié comptant, de me donner pour le reste des délégations irrévocables sur des fermiers ou régisseurs, bien acceptées, bien autorisées, et bien légalisées ; je n’ai pas le temps d’attendre, et j’ai bien la mine de mourir avant d’avoir obtenu de quoi vivre.

J’ai fort à cœur que votre baron banquier[3] n’ait rang et séance qu’après moi au conseil souverain de Colmar, pour l’article des dettes. Quand il s’agira d’une diète de l’Empire, il peut passer devant moi tant qu’il voudra.

Si l’indigente chambre des finances de monseigneur ne me fait pas une réponse catégorique, j’enverrai certaine grosse en vertu de laquelle Simon Magus instrumentera vigoureusement : interea patilur justus.

Adieu, mon cher ami ; on ne peut vous aimer ni vous regretter plus sincèrement que l’ermite de Ferney.

7070. — À M. DAMILAVILLE.
18 novembre.

Je présume, mon cher ami, qu’on vous a donné de fausses alarmes. Il n’est point du tout vraisemblable qu’un conseiller d’État, occupé d’une décision du roi qui le regarde, ait attendu un autre conseiller d’État à la porte du cabinet du roi, pour parler contre vous. On ne songe dans ce moment qu’à soi-même,

  1. Chapitre xxv.
  2. Cette lettre est perdue.
  3. Dietrich.