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CORRESPONDANCE.
7153. — À M. LE BARON GRIMM.
29 janvier.

Puisque votre ami, monsieur, veut absolument avoir les polissonneries que vous méprisez, je les lui envoie sous votre enveloppe[1]. Je n’en fais pas plus de cas que vous, et c’est bien malgré moi que je me suis chargé de ces rogatons.

Votre très-humble et très-obéissant serviteur.

Brossier[2].
7154. — À M. DE CHABANON.
À Ferney, 29 janvier.

Ami vrai et poëte philosophe, ne vous avais-je pas bien dit[3] que le lecteur[4] ne serait jamais l’approbateur, et qu’il éluderait tous les moyens de me plaire, malgré tous les moyens qu’il a trouvés de plaire ? Ne trouvez-vous pas qu’il cite bien a propos feu M. le dauphin, qui, sans doute, reviendra de l’autre monde pour empêcher qu’on ne mette des doubles-croches sur la mâchoire d’âne de Samson ? Ah ! mon fils, mon fils ! la petite jalousie est un caractère indélébile.

M. le duc de Choiseul n’est pas, je crois, musicien : c’est la seule chose qui lui manque ; mais je suis persuadé que, dans l’occasion, il protégerait la mâchoire d’âne de Samson contre les mâchoires d’âne qui s’opposeraient à ce divertissement honnête, ut ut est. Il faut une terrible musique pour ce Samson qui fait des miracles de diable ; et je doute fort que le ridicule mélange de la musique italienne avec la française, dont on est aujourd’hui infatué, puisse parvenir aux beautés vraies, mâles et vigoureuses, et à la déclamation énergique que Samson exige dans

    les commis de la poste, occupés à lire les lettres des honnêtes gens pour leur instruction et pour celle du gouvernement, s’étaient imaginé pendant longtemps que ces lettres étaient d’un M. Écrlinf, demeurant en Suisse. « Ce M. Écrlinf n’écrit pas mal », disaient-ils. (Note copiée sur une copie faite dans le temps.) (B.

  1. C’était l’Homme aux quarante écus (voyez tome XXI, page 305) et le Dîner du comte de Boulainvilliers (voyez tome XXVI, page 531).
  2. Brossier était censé un habitant de Lyon ; c’est un des noms que Voltaire mettait quelquefois par précaution (voyez tome XLIII, page 568) au bas de ses lettres.
  3. Lettre 7143.
  4. M. de Moncrif, lecteur de la reine. (K.)