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CORRESPONDANCE
7211. — À M. DE CHENEVIÈRES[1].
18 mars.

Mon cher ami, les auteurs et les actrices ont cela de commun avec les princes qu’on dit toujours des sottises d’eux, quand ils n’en feraient pas. Je compte que vous aurez vu maman, et qu’elle vous aura bien détrompé. Elle est à Paris pour les affaires les plus pressantes, et moi je vais à Stuttgard arranger les siennes avec M. le prince de Wurtemberg, notre voisin, sur lequel nous avons la plus grande partie de notre bien. Je ne veux pas laisser en mourant les affaires embrouillées, j’ai été un petit duc de Wurtemberg ; je me suis ruiné en fêtes. Avec toute ma philosophie, je suis un plaisant philosophe ; mais je vous jure que je n’ai nul goût pour tout ce fracas, et que je n’ai fait le merveilleux que par complaisance.

Je vous demande en grâce de dire à M. le comte de Rochefort que je lui serai attaché jusqu’au dernier moment de ma vie, comme à vous et à la sœur-du-pot.

7212. — À M. HENIN.
18 mars.

J’étais près de signer le traité aujourd’hui, mon cher ministre. On donne deux cent vingt mille livres, en prenant la moitié des meubles, et me donnant l’autre ; mais on ne paye que soixante mille livres argent comptant, et le reste en dix années. Cet arrangement m’a paru peu convenable. Je n’ai point signé. Il faut un peu plus d’argent comptant. Voyez si vous pouvez rendre ce service à Mme Denis. Voici un état fidèle de la terre. J’ai le cœur navré en la quittant ; mais je ne l’ai bâtie que pour maman, et il faut que la vente la mette à son aise.

Quand vous serez à votre maison de campagne, ne pouvez-vous pas pousser jusqu’à Ferney ? Car, en conscience, je ne puis aller à Genève.

Dès que vous serez arrangé dans votre petite maison, je quitterai mes confins uniquement pour vous.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.