Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome45.djvu/86

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peut avoir les suites les plus funestes, puisqu’on a manqué d’arrêter le mal dans son principe. Je m’abandonne à la destinée : c’est tout ce qu’on peut faire quand on ne peut remuer, et qu’on est dans son lit, entouré de soldats et de neige.

M. Chardon me mande qu’il a trouvé le mémoire de M. de Beaumont pour les Sirven bien faible. Vous étiez de cet avis ; il est triste que vous ayez raison.

Nous sommes délivrés de la famine par les soins de M. le duc de Choiseul.

J’ai tellement refondu mes Scythes que l’édition de Cramer ne peut plus servir à rien, et qu’il en faut faire une autre. Voici la préface, en attendant la pièce. J’ai été bien aise de rendre un témoignage public à Tonpla[1]. Ce n’est pas que je sois content de lui : on dit qu’il laisse élever sa fille dans des principes qu’il déteste ; c’est Orosmade qui livre ses enfants à Arimane ; ce péché contre nature est horrible. Je me flatte qu’il sévrera enfin un enfant qu’il a laissé nourrir du lait des furies.

On dit des merveilles de mon confrère Thomas. Je vous supplie d’envoyer l’incluse à votre ami[2].

Adieu, je souffre beaucoup, mais je vous aime davantage.

6706. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL[3].
30 janvier, part le 31.

Nous sommes très-inquiets de la santé d’un de nos anges, et nous en demandons des nouvelles à l’autre. Voici bientôt le temps de vous amuser des Scythes. J’envoie deux exemplaires très-bien corrigés à M. le duc de Praslin ; je vous prie d’en remettre un à M. Lekain, de faire porter les corrections sur les autres, de les examiner avec vos amis, et de faire valoir auprès d’eux ma docilité et mes efforts. Comptez que c’est beaucoup pour un malade enseveli dans la neige et dans les chagrins.

Mon dernier mot est rarement mon dernier mot. Voici enfin la leçon suivant laquelle nous jouons le cinquième acte à Ferney. Ce dernier acte nous a fait la plus grande impression. Nous avons trouvé dans Mme de La Harpe un talent bien singulier ; il ne lui a fallu que deux ou trois répétitions pour acquérir ce que Mlle Clairon a longtemps cherché. Sa déclamation, pleine de ten-

  1. Diderot.
  2. Diderot ; cette lettre manque.
  3. Éditeurs, de Cayrol et François.