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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome46.djvu/381

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ANNÉE 1769.

cation formelle qui aurait fait un bruit diabolique. Il faisait plus, il prenait des mesures pour me faire accuser au parlement de Dijon d’avoir fait des ouvrages très-impies. Je sais bien que j’aurais confondu l’accusateur devant Dieu et devant les hommes ; mais il en est de ces procès comme de ceux des dames qui plaident en séparation ; elles sont toujours soupçonnées. Je n’ai fait aucune démarche dans toute cette affaire que par le conseil de deux avocats. J’ai toujours mis mon curé et ma paroisse dans mes intérêts. J’ai d’ailleurs agi en tout conformément aux lois du royaume.

À l’égard du Massillon, j’ai pris juste le temps qu’un président du parlement de Dijon est venu dîner chez moi, et c’était une bonne réponse aux discours licencieux et punissables que le scélérat m’accusait d’avoir tenus à table. En un mot, il m’a fallu combattre cet homme avec ses propres armes. Quand il a vu que j’entendais parfaitement cette sorte de guerre, et que j’étais inattaquable dans mon poste, le croquant s’y est pris d’une autre façon ; il a eu la bêtise de faire imprimer les lettres qu’il m’avait écrites, et mes réponses.

Il a poussé même l’indiscrétion jusqu’à mettre dans ce recueil une lettre de M. de Saint-Florentin, sans lui en demander la permission. Il a eu encore la sottise d’intituler cette lettre de façon à choquer le ministre. Je me suis contenté d’envoyer le tout à M. le comte de Saint-Florentin, sans faire la moindre réponse. Le ministre m’en a su très-bon gré, et a fort approuvé ma conduite.

Vous n’êtes pas au bout. L’énergumène, voyant que je ne répondais pas, et que j’étais bien loin de tomber dans le piège qu’il m’avait tendu si grossièrement, a pris un autre tour beaucoup plus hardi et presque incroyable. Il a fait imprimer une prétendue profession de foi qu’il suppose que j’ai faite par-devant notaire, en présence de témoins ; et voici comme il raisonnait :

« Je sais bien que cet acte peut être aisément convaincu de faux, et que, si on voulait procéder juridiquement, ceux qui l’ont forgé seraient condamnés ; mais mon diocésain n’osera jamais faire une telle démarche, et dire qu’il n’a pas fait une profession de foi catholique. »

Il se trompe en cela comme en tout le reste, car je pourrais bien dire aux témoins qu’on a fait signer : Je souscris à la profession de foi, je suis bon catholique comme vous ; mais je ne souscris pas aux sottises que vous me faites dire dans cette pro-