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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome46.djvu/581

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année 1769.

rante ; une autre est morte. Cramer commande la garde. Il faut espérer que son magasin ne sera pas brûlé. Le diable est partout. J’espère que je l’exorciserai, en qualité de capucin : car il faut que vous sachiez que je suis agrégé à l’ordre des capucins par notre général Amatus d’Alamballa, résidant à Rome, qui m’a envoyé mes lettres patentes. C’est une obligation que j’ai à saint Cucufin, et j’en sens tout le prix. Je prie Dieu pour vous. Recevez ma bénédiction.

Fr. François V., capucin indigne
7796. — DE M. HENNIN[1].
À Genève, 21 février 1770.

Tous les malheurs que le prophète Jean[2] avait annoncés n’arriveront pas. Huit des chefs des natifs sont bannis ; le reste doit prêter un nouveau serment, ou sortir des terres de la république dans huit jours. On accorde aux natifs de nouveaux privilèges. Quant aux motifs de la levée de bouclier, on les cache, et on a dit qu’on ne voulait pas pousser plus loin l’examen de cette affaire à cause des puissances étrangères.

Je souhaite que la voix de Jean se fasse entendre, et que, pour le bien de l’humanité, il atteigne l’âge des patriarches.

7797. — DE M. D’ALEMBERT.
À Paris, ce 22 février.

Que vous êtes heureux, mon cher et illustre maître, de pouvoir, à votre âge de soixante-seize ans, vous occuper encore plusieurs heures par jour ! Pour moi, je suis obligé depuis six semaines de renoncer à toute espèce de travail, grâce à une faiblesse de tête qui me permet à peine de vous écrire. Elle me tourne presque autant qu’au nouveau contrôleur général[3], dont vous aurez appris les belles opérations, et aux pauvres libraires de l’Encyclopédie, dont vous aurez appris la déconfiture. Je voudrais bien aller partager votre solitude ; mais je ne puis, dans l’état ou je suis, m’exposer à changer de place, quoique je ne me trouve pas trop bien à la mienne.

Vous n’êtes que trop bien informé de l’affaire de Martin ; il est très vrai que le procureur général travaille a réhabiliter sa mémoire : cela fera grand bien au pauvre roué et à sa malheureuse famille dispersée et sans pain. En vérité, notre jurisprudence criminelle est le chef-d’œuvre de l’atrocité et de la bêtise. À propos, on dit que les Sirven ont été déclarés innocents au parlement de Toulouse ; on ajoute que la tragédie des Guèbres a été ou doit être

  1. Correspondance inédite de Voltaire avec P.-M. Hennin ; Paris, 1825.
  2. Voyez la lettre n° 7789.
  3. Terray ; voyez tome IX, page 557.