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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome47.djvu/227

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ANNÉE 1770.

pouvais étonner un homme qui ne s’attend point à cette aubaine, ce serait assurément une très-bonne plaisanterie ; elle serait très-digne de vous, et je vous devrais le bonheur de la fin de ma vie.

Il y a encore un article sur lequel je dois vous ouvrir mon cœur, c’est que je ne demanderai rien pour le pays de Gex à celui qui m’a ôté les moyens d’y faire un peu de bien ; je n’aime à demander qu’à certaines âmes élevées.

Les sœurs de la charité prient Dieu pour vous ; elles sont comblées de vos grâces, ainsi que les capucins. Vous aurez de tous côtés des protections en paradis. Mais comme vous êtes faite pour avoir des amis partout, je vous supplie, madame, de compter sur moi et sur mon neveu en enfer.

Je me mets aux pieds de ma protectrice, pour les quatre jours que j’ai à végéter dans ce bas monde, et je la prie toujours d’agréer le profond respect et la reconnaissance du vieil ermite.

8043. — À M. LE MARÉCHAL DUC DE RICHELIEU.
À Ferney, 8 octobre.

Je suis très-reconnaissant, monseigneur, de votre lettre du 30 de septembre. Je suis charmé qu’elle soit datée de Versailles, et encore plus que vous ayez été à Richelieu. Il y a là je ne sais quel esprit de philosophie qui me fait bien augurer de vous. Pour votre souper à Bordeaux, je sais qu’il a été excellent ; que tous les convives en ont été fort contents ; qu’il y en a à qui vous avez fait mettre de l’eau dans leur vin, et que le roi a dû trouver que vous êtes le premier homme du monde pour arranger ces soupers-là.

Ayez la bonté d’agréer mon compliment sur la paternité de M. le prince Pignatelli, puisque je ne puis vous en faire sur la maternité de Mme la comtesse d’Egmont. C’est bien dommage assurément qu’elle ne produise pas des êtres ressemblants à son grand-père et à elle. Je vous demande votre protection auprès d’elle et auprès de monsieur son beau frère. Ils m’ont tous deux lié à vous par de nouvelles chaînes : Mme la comtesse d’Egmont, par la lettre pleine d’esprit et de grâces qu’elle a bien voulu m’écrire ; et M. le prince Pignatelli, par la supériorité d’esprit qu’il m’a paru avoir sur les jeunes gens de son age.

Vous me reprochez toujours les philosophes et la philosophie. Si vous avez le temps et la patience de lire ce que je