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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome47.djvu/249

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ANNÉE 1770.
8067. À M. CHRISTIN[1].
31 octobre.

Mon cher petit philosophe, à qui tout Ferney fait les plus tendres compliments, a fait un très-bon article sur le mariage. Il n’est pas possible qu’il ne fasse pas un très-heureux mariage après en avoir si bien parlé.

Il se pourra bien qu’on ne rapporte l’affaire des esclaves qu’après la Saint-Martin. Tant mieux ! nous aurons alors le discours de M. Seguier, qui nous sera d’un très-grand secours.

On embrasse tendrement mon cher petit philosophe.

8068. — À M. LE COMTE DE ROCHEFORT.
Ferney.

Je me hâte, monsieur, de vous remercier de vos bontés ; je crains que ma lettre ne vous trouve pas dans vos terres du Gévaudan ; mais elle vous sera renvoyée à Paris ou à Versailles. Pourquoi n’ai-je pas eu la consolation de rendre mes hommages à ce couple aimable dans ma solitude ? Elle est bien triste ; nous y sommes tous malades[2].

Je ne pourrai vous présenter sitôt le Siècle de Louis XIV et de Louis XV. C’est un ouvrage aussi difficile qu’immense. Il y a deux ans que j’y travaille ; mais il sera fini bientôt.

Pendant que je fais mes efforts pour élever ce monument à la gloire du roi et de ma patrie, la calomnie prend des pierres pour écraser l’auteur ; le jansénisme hurle, les dévots cabalent ; on ne cesse de m’imputer des brochures contre des choses que je respecte et dont je ne parle jamais. Les assassins du chevalier de La Barre voudraient une seconde victime ; vous ne sauriez croire jusqu’où va la fureur de ces ennemis de l’humanité : la solitude, les maladies, rien ne les désarme, rien ne les apaise ; il s’élève une espèce d’inquisition en France, tandis que celle d’Espagne pleure d’avoir les griffes coupées et ses ongles arrachés ; ceux même qui méprisent et qui affligent le plus le chef prétendu de l’Église se font une gloire barbare de paraître les

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Ce billet, auquel on avait cousu jusqu’alors celui du 12 octobre, ne nous semble pas être ici à sa place. Ce qui suit appartient également à une autre époque. (G. A.)