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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/178

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CORRESPONDANCE.

Vous vous étonnez d’abord que cette affaire m’inquiète ; mais la raison en est qu’on m’attribue la lettre, et qu’on l’a envoyée au pape en lui disant qu’elle était de moi. Voilà une tracasserie d’un genre tout nouveau.

Je vous supplie, mon cher ange, de vous informer de ce que c’est que cet abbé Pinzo, et sa lettre. Je ne doute pas que quelques ex-jésuites ne fomentent cette calomnie. Ces bonnes gens sont les premiers hommes du monde quand il s’agit d’imposture. Je sais combien cette accusation est absurde ; mais l’absurdité ne rassure pas. Il faut donc toujours combattre jusqu’au dernier moment. Voilà tout ce que vaut cette malheureuse fumée de la réputation. Allons donc, combattons ; j’ai encore bec et ongles.

J’écrivis l’année passée à Boileau[1] ; je viens d’écrire à Horace[2] tout ce que j’ai sur le cœur. Je vous l’enverrai pour vous amuser. Il y a loin d’Horace à l’abbé Pinzo.

Je me mets à l’ombre des ailes de mes anges.

8624. — DE CATHERINE II[3],
impératrice de russie.
Le 1-12 septembre 1772.

Monsieur, j’ai à vous annoncer, en réponse à votre lettre du 21 d’août, que je m’en vais commencer avec Moustapha une nouvelle correspondance à coups de canon. Il lui a plu d’ordonner à ses plénipotentiaires de rompre le congrès de Fokchani, et la trêve finit aujourd’hui. C’est apparemment l’âme qui a ce département-là qui vous a dit cette nouvelle. Je vous prie de m’instruire de ce que font les autres âmes que vous me donnez : tandis que je pense à Moustapha, il m’a toujours paru que je n’avais à la fois qu’une idée. J’espère qu’au moins messieurs les théologiens me feront un compliment en cérémonie au premier concile universel où je présiderai, pour avoir soutenu leur avis en cette occasion.

Je suis bien fâchée de ce que vos cèdres n’ont point germé ; s’il vous reste des fèves, je vous conseille de les faire semer cet automne, et vous les verrez sortir de terre au printemps prochain.

Je crois qu’il faut ranger le château que les dames polonaises prétendent bâtir aux officiers français engagés au service des prétendus confédérés au nombre de beaucoup d’autres bâtiments pareils, élevés dans l’imagination

  1. C’était en 1769 ; voyez tome X. page 397.
  2. Voyez ibid., page 441.
  3. Collection de Documents, Mémoires et Correspondances, etc., publiée par la Société impériale de l’histoire de Russie, tome XV, page 266.